• Quand viendra ce jour là, que ton nom au vray passe
    Par France dans mes vers ? combien et quantes fois
    S'en empresse mon coeur, s'en demangent mes doits ?
    Souvent dans mes escris de soy mesme il prend place.

    Maulgré moy je t'escris, maulgré moy je t'efface.
    Quand Astree viendroit, et la foy, et le droit,
    Alors, joyeux, ton nom au monde se rendroit....

  • Ce jourd'huy du Soleil la chaleur alteree
    A jauny le long poil de la belle Ceres :
    Ores il se retire ; et nous gaignons le frais,
    Ma Marguerite et moy, de la douce seree,

    Nous traçons dans les bois quelque voye esgaree :
    Amour marche devant, et nous marchons apres.
    Si le vert ne nous plaist des espesses forests,
    Nous descendons pour voir la couleur...

  • Or, dis je bien, mon esperance est morte.
    Or est ce faict de mon ayse et mon bien.
    Mon mal est clair : maintenant je veoy bien,
    J'ay espousé la douleur que je porte.

    Tout me court sus, rien ne me reconforte,
    Tout m'abandonne, et d'elle je n'ay rien,
    Sinon tousjours quelque nouveau soustien,
    Qui rend ma peine et ma douleur plus forte.

    Ce...

  • Ô vous, mauditz sonnetz, vous qui prinstes l'audace
    De toucher à Madame ! ô malings et pervers,
    Des Muses le reproche, et honte de mes vers !
    Si je vous feis jamais, s'il fault que je me face

    Ce tort de confesser vous tenir de ma race,
    Lors, pour vous, les ruisseaux ne furent pas ouverts
    D'Apollon le doré, des Muses aux yeulx verts ;
    Mais vous receut...

  • Ce dict maint un de moy : " De quoy se plaint il tant,
    Perdant ses ans meilleurs, en chose si legiere ?
    Qu'a il tant à crier, si encore il espere ?
    Et, s'il n'espere rien, pour quoy n'est il content ? "

    Quand j'estois libre et sain, j'en disois bien autant ;
    Mais certes celuy là n'a la raison entiere,
    Ains a le coeur gasté de quelque rigueur fiere,...

  • J'allois seul remaschant mes angoisses passes :
    Voici (Dieux destournez ce triste mal-encontre !)
    Sur chemin d'un grand loup l'effroyable rencontre,
    Qui, vainqueur des brebis de leur chien delaissees,

    Tirassoit d'un mouton les cuisses despecees,
    Le grand deuil du berger. Il rechigne et me monstre
    Les dents rouges de sang, et puis me passe contre,
    ...

  • Puis qu'ainsi sont mes dures destinees,
    J'en saouleray, si je puis, mon soucy,
    Si j'ay du mal, elle le veut aussi :
    J'accompliray mes peines ordonnees.

    Nymphes des bois, qui avez, estonnees,
    De mes douleurs, je croy, quelque mercy,
    Qu'en pensez-vous ? Puis-je durer ainsi,
    Si à mes maux tresves ne sont donnees ?

    Or si quelqu'une à m'...

  • J'ay tant vescu, chetif, en ma langueur,
    Qu'or j'ay veu rompre, et suis encor en vie.
    Mon esperance avant mes yeulx ravie,
    Contre l'escueil de sa fiere rigueur.

    Que m'a servy de tant d'ans la longueur ?
    Elle n'est pas de ma peine assouvie :
    Elle s'en rit, et n'a point d'aultre envie
    Que de tenir mon mal en sa vigueur.

    Doncques j'auray,...

  • Ce sont tes yeux tranchans qui me font le courage.
    Je veoy saulter dedans la gaïe liberté,
    Et mon petit archer, qui mene à son costé
    La belle gaillardise et plaisir le volage ;

    Mais apres, la rigueur de ton triste langage
    Me monstre dans ton coeur la fiere honesteté ;
    Et, condemné, je veoy la dure chasteté
    Là gravement assise et la vertu sauvage....

  • J'ay un Livre Thuscan, dont la tranche est garnie
    Richement d'or battu de l'une et l'autre part ;
    Le dessus reluit d'or ; et au dedans est l'art
    Du comte Balthasar, de la Contisanie.

    Où que je sois, ce livre est en ma compagnie.
    Aussi c'est un present de celle qui depart
    A tout ce qu'elle voit, à ce qui d'elle part,
    Quelque part, quelque ray de...