• Si mille oeillets, si mille liz j'embrasse,
    Entortillant mes bras tout à l'entour,
    Plus fort qu'un cep, qui d'un amoureux tour
    La branche aimée, en mille plis enlasse :

    Si le soucy ne jaunist plus ma face,
    Si le plaisir fait en moy son le jour,
    Si j'aime mieux les Ombres que le jour ,
    Songe divin, ce bien vient de ta grace.

    Suyvant ton vol je...

  • Plus mille fois que nul or terrien,
    J'aime ce front où mon tyran se joue
    Et le vermeil de cette belle joue,
    Qui fait honteux le pourpre Tyrien.

    Toutes beautés à mes yeux ne sont rien,
    Au prix du sein qui lentement secoue
    Son gorgerin, sous qui doucement noue
    Un petit flot que Vénus dirait sien.

    Ne plus, ne moins, que Jupiter est aise,
    ...

  • Durant les grand's chaleurs, j'ai vu cent mille fois
    Qu'en voyant un éclair flamboyer en la nue,
    Soudain comme transie et morte devenue,
    Tu perdais tout à coup la parole et la voix.

    De pouls ni de couleur tant soit peu tu n'avais,
    Et bien que de l'effroi tu fusses revenue,
    Si n'osais-tu pourtant dresser en haut la vue,
    Voire, un long temps après,...

  • Mille baisers perdus, mille et mille faveurs,
    Sont autant de bourreaux de ma triste pensée,
    Rien ne la rend malade et ne l'a offensée
    Que le sucre, le ris, le miel et les douceurs.

    Mon coeur est donc contraire à tous les autres coeurs,
    Mon penser est bizarre et mon âme insensée
    Qui fait présente encor' une chose passée,
    Crevant de désespoir le fiel...

  • Le jour, le point, mille foys attendu
    L'heure, et la nuit, mille fois attenduë,
    M'ont desormais entre les bras rendu
    D'une qui s'est entre mes bras renduë.

    D'ame, et d'esprit, je suis tout esperdu !
    D'ame, et d'esprit, elle est toute esperduë !
    Ô jour luisant ! ô soulas pretendu !
    Ô dous esbat ! ô joye pretenduë !

    D'un tel discours mes...

  • Que me fuis-tu ? Mille Nymphes me cherchent
    Les Muses m'ont apporté leurs presens,
    J'ay de Venus les verds myrtes plaisans,
    J'ay de Phebus les lauriers qui ne sechent.

    Cruelle, au moins si tels biens ne t'allechent,
    Si mon amour, si mes soucis pesans,
    Pren, pren pitié de ces miens jeunes ans,
    Qui comme l'herbe au soleil se dessechent.
    ...

  • Maudit soit mille fois le Borgne de Libye,
    Qui, le coeur des rochers perçant de part en part,
    Des Alpes renversa le naturel rempart,
    Pour ouvrir le chemin de France en Italie.

    Mars n'eût empoisonné d'une éternelle envie
    Le coeur de l'Espagnol et du Français soudard,
    Et tant de gens de bien ne seraient en hasard
    De venir perdre ici et l'honneur et la...

  • Ici de mille fards la traïson se déguise,
    Ici mille forfaits pullulent à foison,
    Ici ne se punit l'homicide ou poison,
    Et la richesse ici par usure est acquise

    Ici les grands maisons viennent de bâtardise,
    Ici ne se croit rien sans humaine raison,
    Ici la volupté est toujours de saison,
    Et d'autant plus y plaît que moins elle est permise.

    ...

  • En mille crespillons les cheveux se friser,
    Se pincer les sourcils, et d'une odeur choisie
    Parfumer haut et bas sa charnure moisie,
    Et de blanc et vermeil sa face déguiser :

    Aller de nuit en masque, en masque deviser,
    Se feindre à tous propos être d'amour saisie,
    Siffler toute la nuit par une jalousie,
    Et par martel de l'un, l'autre favoriser :
    ...