• Dure au mordant soleil, longtemps épanouie
    Aux grands effluves lourds et tièdes du vent plat,
    La neige, ayant enfin fléchi, perdu l’éclat,
    Venait de consommer sa fonte sous la pluie.

    L’espace détendu ! le bruit désemmuré !
    Et les cieux bleus, enfin ! pour mes regards moroses,
    Avides de revoir le vieil aspect des choses,
    Tout surgissait nouveau du sol...

  • L’orage, après de longs repos,
    Ce soir-là, par ses deux suppôts,

    La nuée et le vent qui claque,
    Se présageait pour l’onde opaque.

    Grondante sous le ciel muet,
    Par quintes, la mer se ruait ;

    Puis, elle se tut, la perfide,
    Reprit son niveau brun livide.

    Malheur aux coquilles de noix
    Alors sur l’élément sournois

    D’un plat, d’un...

  •  
    La vieille toiture en ardoises
    Étincelle dès le matin
    Sur le coteau qui sent le thym
    Et qui plaît aux chèvres narquoises.

    Au temps des vipères sournoises,
    Et jusqu’après la Saint-Martin,
    La vieille toiture en ardoises
    Étincelle dès le matin.

    Et dans la saison des framboises,
    On voit luire au fond du lointain,
    Avec l'éclair...

  •  
    À l’heure où le grillon racle sa ritournelle,
    Lorsque le jour s’en va du monde curieux,
    La tonnelle profonde, au banc mystérieux,
    Tressaille en regardant la montagne éternelle.

    Là, mon rêve enivré d’une paix solennelle
    Poursuit nonchalamment son vol silencieux,
    Car tous les bruits du soir, rauques et gracieux,
    Arrivent tamisés dans la bonne...

  •  
    Mon crâne est un fourneau d’où la flamme déborde :
    Martyre opiniâtre et lent comme un remords !
    Et je sens dans mes os l’épouvantable horde
    Des névroses de feu qui galopent sans mors.

    Comme un vaisseau brisé, sans espoir qu’il aborde,
    Mon cœur va s’enfonçant dans le gouffre des morts,
    Loin du passé qui raille et que le regret borde ;
    Et je...

  • Le plein midi darde ses flèches
    Dans l’air chaud comme une fournaise.
    Je chemine tout à mon aise,
    Loin des fiacres et des calèches.

    Ici, promenades et pêches.
    J’aime ça, ne vous en déplaise ;
    Le plein midi darde ses flèches
    Dans l’air chaud comme une fournaise.

    Cher pays, comme tu m’allèches
    Par tes rocs et ta terre glaise !
    Je n’...

  • « Maint’nant, dans les auberg’, i’ n’veul’ plus q’du pain d’riches,
    En couronn’, comme en flût’, de tout’ manière… eh bien !
    L’pain d’seigle et d’pur froment, quoiqu’i’ dis’, voilà l’mien !
    Pour en manger mon saoul, j’leur laiss’rais tout’ leurs miches.

    Ah ! les tourt’ qu’on faisait cheux nous, quand j’étais p’tit !
    D’bout, en rang dans l’barreau, sous la poutre...

  •  
    Mon sentiment s’écroule et tombe,
    L’indifférence me remplit,
    Car ma haine s’ensevelit
    Pendant que ma pitié succombe.

    La femme couleuvre et colombe
    N’est pour moi qu’un fait accompli
    Mon sentiment s’écroule et tombe,
    L’indifférence me remplit.

    Sous la rafale, sous la trombe,
    Mon calme inerte et sans un pli
    Dort les longs...

  •  
    L’un des treize viveurs que la tristesse ronge
    Ayant dit : « Voyons donc, qui de nous, l’autre nuit,
    A fait le plus horrible songe ? »
    Chacun parle à son tour et conte ce qui suit :

    Je rêvais que j’étais pieds liés, bras au dos,
    ...

  • Tu tricotais ton bas de laine,
    Toute rose et toute mignarde,
    Ô ma friponne campagnarde,
    Quand je t’abordai hors d’haleine.

    — Suis-je encore loin de la plaine ?
    — Oui, monsieur, fis-tu goguenarde,
    Tu tricotais ton bas de laine,
    Toute rose et toute mignarde.

    Or, j’avais bu comme Silène,
    Et j’étais d’humeur si gaillarde,
    Que je dis...