• Le cabaret qui n'est pas neuf
    Est bondé des plus vieux ivrognes
    Dont rouge brique sont les trognes
    Entre les grands murs sang de boeuf.
    L'un d'entre eux, chenu comme un oeuf,
    D'une main sur la table cogne,
    Et, son verre dans l'autre, il grogne :
    " Aussi vrai que j'suis d'Châteauneuf !
    J'reste un bon coq, et l'diab' me rogne !
    Je r'prendrais...

  • Lorsque la pluie, ainsi qu'un immense écheveau
    Brouillant à l'infini ses longs fils d'eau glacée,
    Tombe d'un ciel funèbre et noir comme un caveau
    Sur Paris, la Babel hurlante et convulsée,

    J'abandonne mon gîte, et sur les ponts de fer,
    Sur le macadam, sur les pavés, sur l'asphalte,
    Laissant mouiller mon crâne où crépite un enfer,
    Je marche à pas...

  • Par ce temps si bénin, après tant de froidure,
    Dans les grands terrains gris, sur les coteaux chenus,
    On a l'impression parmi ces arbres nus
    D'un très beau jour d'été sans fleurs et sans verdure.

    Les pieds ne glissent plus sur la terre moins dure
    Où les feux du soleil, presque tous revenus,
    Allument cailloux, rocs, sable et gazons menus.
    Dans l'...

  • Foisonnantes, couvant des venins séculaires
    Dans ce marécageux semis d'herbe et de rocs,
    Les ronces, par fouillis épais comme des blocs,
    Embusquaient sourdement leurs dards triangulaires.

    Ah certe ! Elles guettaient si bien l'occasion
    Du Mal, si scélérate épiait leur adresse,
    Que l'accrochant éclair de leurs griffes traîtresses
    Fut plus subtil...

  • Maintenant, je suis malheureux
    De rencontrer ces fleurs clochettes
    A bords dentelés, violettes,
    Sur les talus des chemins creux.

    Et pourtant ces douces fluettes
    Sont encor dans leur coin frileux,
    Le perchoir des papillons bleus
    Qui s'en font des escarpolettes.

    Mais qu'importe ! La canicule
    Tire à sa fin. L'été recule...
    Et,...

  • A cette heure, elle n'est sensible,
    La grande cascade du roc,
    Qui par son tonnerre d'un bloc,
    La nuit la rend toute invisible.

    Et, pourtant, sa rumeur compacte
    Décèle son bavement fou,
    Sa chute à pic, en casse-cou,
    Son ruement lourd de cataracte.

    Un instant, l'astre frais et pur
    Écarte son nuage obscur,
    Comme un oeil lève sa...

  • La forêt songe, bleue et pâle,
    Dans un féerique demi-jour.
    Tout s'y voit spectral, d'aspect sourd,
    Par cette nuit d'ambre et d'opale.

    Là, c'est un cerf blessé qui râle...
    Ici, d'autres, pâmés d'amour...
    La forêt songe, bleue et pâle,
    Dans un féerique demi-jour.

    Ailleurs, une laie et son mâle
    Et leurs marcassins tout autour !......

  • Le souvenir d'un rêve à chaque instant m'arrive
    Comme un remords subtil à la fois âcre et cher,
    Et pour me soulager il faut que je t'écrive
    Le redoutable aveu qui fait frémir ma chair :

    Sur les bords d'un lac pur où se baignaient des Anges,
    Dans un paradis vert plein d'arbres qui chantaient
    Des airs mystérieux sur des rythmes étranges,
    Je regardais le...

  • Parmi châtaigniers et genêts
    Où s'émouchaient, sans pouvoir paître,
    Des montures sous le harnais,
    Ronflait l'humble fête champêtre.

    Les crincrins et les cornemuses,
    La ripaille, un soleil de feu,
    Allumaient tout un monde bleu
    A faces longues et camuses.

    Et, tandis que ce flot humain
    - L'enfance comme la vieillesse -
    Battait...

  • 0 ma si fragile compagne,
    Puisque nous souffrons à Paris,
    Envolons-nous dans la campagne
    Au milieu des gazons fleuris.

    Loin, bien loin des foules humaines,
    Où grouillent tant de c?urs bourbeux,
    Allons passer quelques semaines
    Chez les peupliers et les boeufs.

    Fuyons les viles courtisanes
    Aux flancs de marbre, aux doigts crochus,...