Rencontre

 

Mignonne au front pudique et tendre,
Nous nous aimons d’un amour pur,
Et dés longtemps, triste à t’attendre,
J’entrevoyais tes yeux d’azur.

Comme une étoile lente A naître
Qu’un pâtre attend sur des sommets,
Tu m’éclairais sans me connaître,
Sans te connaître je t’aimais.

Aussi quand je t’ai rencontrée,
Charmante, avec ton air rieur,
J’ai cru t’avoir même adorée
Dans quelque monde antérieur.

Tes cheveux frisant sur les tempes
En un mince et soyeux duvet,
Tes yeux luisants comme des lampes,
Sont bien ceux dont mon cœur rêvait.

Et ton esprit tendre où j’épelle
Me semble un missel retrouvé,
Baigné d’un parfum de chapelle,
Où je relis l’ancien Avé.

Tu réalises ma chimère,
Tu réponds au rêve idéal
Qu’au fond de ma pensée amère
Je pressentais dans Floréal.

Tout s’aime : avril chante et rayonne,
Et le printemps, ce peintre exquis,
Avec des rayons d’or crayonne
Au fond des bois son frais croquis.
 

Dans un adorable mystère
Vois donc s’unir sous le ciel clair,
Les fleurs, papillons de la terre,
Et les papillons, fleurs de l’air.

Les ailes cherchent les corolles ;
Les mains se rapprochent des mains,
Et d’inoubliables paroles
Se croisent dans tous les chemins !

Sur la ramure ensoleillée
Les oiseaux arrêtent leur vol ;
Couchons-nous dans l’herbe mouillée,
A deux sous ton blanc parasol.

Aimons-nous pour un jour, qu’importe !
Les serments que nous échangeons,
Le vent printanier les emporte
Avec l’eau qui fuit dans les joncs.

La destinée est ainsi faite
Que le temps doit nous désunir,
Et qu’il faudra quitter la fête
Dans un très prochain avenir ;

Mais nous avons l’âme assez haute
Pour regarder notre bonheur
Sans l’assombrir par une faute
Qui ferait saigner notre honneur !…

Nos âmes brûleront ensemble
Comme deux cierges assidus,
Comptant sur le Dieu qui rassemble
Les amants qui se sont perdus.

Collection: 
1879

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