Question

 
Être ou ne pas être.

Riche ! la nuit descend. Tout annonce un orage.
Pour soustraire à la foudre et sauver du naufrage
Tes trésors et ta vie, ô Riche, n’attends pas
Que d’un peuple grondant la montante marée
Ait envahi la grève où ta barque amarrée
Sommeille aveuglement sous l’orgueil de ses mâts.
 
Riche ! ne vois-tu pas le sinistre navire
Qui naguère tonnait sur le Rhône en délire,
Teint encor à nos yeux de longs reflets de sang,
S avancer aux signaux du canon de détresse
Dont les vents Irlandais nous apportent sans cesse,
Sur des ailes de flamme, un écho menaçant ?

Attiré par l’éclat dont brille ton étoile,
Le Peuple fatigué demande pour sa voile
L’azur d’un ciel plus doux, l’abri d’un meilleur port ;
Des riches cargaisons éparses sur la plage
Il rêve quelquefois un plus digne partage
Rêve du Pauvre, hélas !... mais rêve du plus Fort.

Riche ! au sein des splendeurs d’une heureuse existence,
Songeant à tous les maux dont souffre l’indigence,
Ne te serais-tu donc jamais dit un moment :
Tant de richesse ici, plus loin tant de misère,
Ici l’ordre et la paix, là le trouble et la guerre,
Est-ce bien là le vœu d’un Dieu juste et clément ?

Collection: 
1838

More from Poet

  •  
    Mort pour la Patrie.

    C’est ici que tomba l’élite de nos Braves,
    C’est ici que mon frère est mort pour son pays,
    Mort, à vingt ans, sous les canons bataves,
    La tête emportée en débris.

    Oh ! celui-là du moins n’a pas jeté ses armes,
    Nâ...

  •  
    À quoi bon ?

    Oh ! dans ces tristes temps de luttes intestines,
    Quand le doute et la honte accablent le plus fort,
    Quand rien n’est vrai sur rien, quand tout tombe en ruines,
    Frappé de vertige ou de mort ;

    Quand les Rois éperdus chancellent sur leurs...

  •  
    Que les temps sont changés !

    Te voilà donc assise au fond de la vallée,
    A genoux, les flancs nus, la tête échevelée,
    Et les deux bras meurtris,
    Priant et conjurant les nochers de ton fleuve
    D’accueillir, par pitié, les plaintes d’une veuve,...

  •  
    J'étais enfant alors.

    Un soir, le vieux René, le héros du village,
    Tournant de mon côté son regard triste et doux,
    Crut trouver sur mon front le signe du courage,
    Et me prédit un sort dont il semblait jaloux.

    Dans sa majesté tricolore
    ...

  •  
    À Mme D.

    Ne reviendrez-vous plus, jours de bonheur paisible !

    Adieu ! L’été s’envole, et l’hiver nous rappelle.
    Adieu ! tout un grand mois s’est enfui comme un jour,
    Mais nous en garderons le souvenir fidèle ;
    Gardez-le, vous, à votre tour...