Ville morte

Vague, perdue au fond des sables monotones,
La ville d'autrefois, sans tours et sans remparts,
Dort le sommeil dernier des vieilles Babylones,
Sous le suaire blanc de ses marbres épars.

Jadis elle régnait ; sur ses murailles fortes
La Victoire étendait ses deux ailes de fer.
Tous les peuples d'Asie assiégeaient ses cent portes ;
Et ses grands escaliers descendaient vers la mer...

Vide à présent, et pour jamais silencieuse,
Pierre à pierre, elle meurt, sous la lune pieuse,
Auprès de son vieux fleuve ainsi qu'elle épuisé,

Et, seul, un éléphant de bronze, en ces désastres,
Droit encore au sommet d'un portique brisé,
Lève tragiquement sa trompe vers les astres.

Collection: 
1879

More from Poet

  • En juillet, quand midi fait éclater les roses,
    Comme un vin dévorant boire l?air irrité,
    Et, tout entier brûlant des fureurs de l?été,
    Abîmer son coeur ivre au gouffre ardent des choses.

    Voir partout la vie, une en ses métamorphoses,
    Jaillir ; et l?Amour, nu comme...

  • Mon coeur est un beau lac solitaire qui tremble,
    Hanté d'oiseaux furtifs et de rameaux frôleurs,
    Où le vol argenté des sylphes bleus s'assemble
    En un soir diaphane où défaillent des fleurs.

    La lune y fait rêver ses pâleurs infinies ;
    L'aurore en son cristal baigne...

  • Partout la mer unique étreint l'horizon nu,
    L'horizon désastreux où la vieille arche flotte ;
    Au pied du mât penchant l'Espérance grelotte,
    Croisant ses bras transis sur son coeur ingénu.

    Depuis mille et mille ans pareils, le soir venu,
    L'Ame assise à la barre,...

  • Oh ! Écoute la symphonie ;
    Rien n'est doux comme une agonie
    Dans la musique indéfinie
    Qu'exhale un lointain vaporeux ;

    D'une langueur la nuit s'enivre,
    Et notre coeur qu'elle délivre
    Du monotone effort de vivre
    Se meurt d'un trépas langoureux.

    ...

  • Les désespoirs sont morts, et mortes les douleurs.
    L'espérance a tissé la robe de la terre ;
    Et ses vieux flancs féconds, travaillés d'un mystère,
    Vont s'entr'ouvrir encor d'une extase de fleurs.

    Les temps sont arrivés, et l'appel de la femme,
    Ce soir, a retenti...