Avril

Avril, l'honneur et des bois
Et des mois,
Avril, la douce esperance
Des fruits qui soubs le coton
Du bouton
Nourrissent leur jeune enfance ;

Avril, l'honneur des prez verds,
Jaune, pers,
Qui d'une humeur bigarrée
Emaillent de mille fleurs
De couleurs
Leur parure diaprée ;

Avril, l'honneur des souspirs
Des zephyrs,
Qui, soubs le vent de leur aelle,
Dressent encore es forests
Des doux rets
Pour ravir Flore la belle ;

Avril, c'est ta douce main
Qui du sein
De la nature desserre
Une moisson de senteurs
Et de fleurs,
Embasmant l'aer et la terre.

Avril, l'honneur verdissant,
Florissant
Sur les tresses blondelettes
De ma dame, et de son sein
Tousjours plein
De mille et mille fleurettes ;

Avril, la grace et le ris
De Cypris,
Le flair et la douce haleine ;
Avril, le parfum des dieux
Qui des cieux
Sentent l'odeur de la plaine.

C'est toy courtois et gentil
Qui d'exil
Retire ces passageres,
Ces arondelles qui vont
Et qui sont
Du printemps les messageres.

L'aubespine et l'aiglantin,
Et le thin,
L'oeillet, le lis et les roses,
En ceste belle saison,
A foison,
Monstrent leurs robes écloses.

Le gentil rossignolet,
Doucelet,
Decoupe dessoubs l'ombrage
Mille fredons babillars,
Fretillars
Au doux chant de son ramage.

C'est à ton heureux retour
Que l'amour
Souffle à doucettes haleines
Un feu croupi et couvert
Que l'hyver
Receloit dedans nos veines.

Tu vois en ce temps nouveau
L'essaim beau
De ces pillardes avettes
Volleter de fleur en fleur
Pour l'odeur
Qu'ils mussent en leurs cuissettes.

May vantera ses fraischeurs,
Ses fruicts meurs
Et sa feconde rosée,
La manne et le sucre doux,
Le miel roux,
Dont sa grace est arrosée.

Mais moy je donne ma voix
A ce mois,
Qui prend le surnom de celle
Qui de l'escumeuse mer
Veit germer
Sa naissance maternelle.

Collection: 
1553

More from Poet

  • Celuy n'est pas heureux qui n'a ce qu'il desire,
    Mais bien-heureux celuy qui ne desire pas
    Ce qu'il n'a point : l'un sert de gracieux appas
    Pour le contentement et l'autre est un martyre.

    Desirer est tourment qui bruslant nous altere
    Et met en passion ; donc ne...

  • A la France.

    Oyseau qui de garde fidelle
    Dessillé fais la sentinelle
    Sous le silence de la nuit,
    Réveillant d'une voix hardie
    La troupe de somme engourdie
    Et de paresse, à ton haut bruit.

    Oyseau à la creste pourprée
    Compagnon de l'Aube dorée,...

  • Avril, l'honneur et des bois
    Et des mois,
    Avril, la douce esperance
    Des fruits qui soubs le coton
    Du bouton
    Nourrissent leur jeune enfance ;

    Avril, l'honneur des prez verds,
    Jaune, pers,
    Qui d'une humeur bigarrée
    Emaillent de mille fleurs...

  • Si tu veux que je meure entre tes bras, m'amie,
    Trousse l'escarlatin de ton beau pellisson
    Puis me baise et me presse et nous entrelassons
    Comme, autour des ormeaux, le lierre se plie.

    Dégraffe ce colet, m'amour, que je manie
    De ton sein blanchissant le petit mont...

  • Ainsi, ma douce guerrière
    Mon coeur, mon tout, ma lumière,
    Vivons ensemble, vivons
    Et suivons

    Les doux sentiers de la jeunesse :
    Aussi bien une vieillesse
    Nous menace sur le port,
    Qui, toute courbe et tremblante,
    Nous entraîne chancelante
    La...