Le Sonnet du pied


Je veux, humiliant mon front & mes genoux,
Proſterné devant toi comme on eſt quand on prie,
Sons le ciel de tes yeux qui font ma rêverie,
Baiſer pieuſement tes pieds petits & doux.

J’étancherai, gardant tout mon déſir pour vous,
La grande ſoif d’aimer qui n’eſt jamais tarie,
O petits pieds, tréſor dont la beauté marie
La roſe triomphale & claire au lys jaloux.

Vous avez des friſſons ſubtils comme les ailes ;
Non moins immaculés que les mains & plus frêles,
A peine vous poſez ſur notre ſol impur.

Peureux, lorſque ma lèvre amoureuſe vous touche,
Je crois ſentir trembler, au ſouffle de ma bouche,
Des oiſeaux retenus captifs loin de l’azur.

Collection: 
1869

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