Loin des villes, des quais, des marchands et des grèves,
Mon vaisseau revenu des plus lointains climats,
Pour que rien ne se mêle aux songes de ses mâts,
S’isole dans la mer qui respecte ses rêves.
Aucune cargaison n’en a rempli les bords,
Il n’a jamais connu le feu des abordages
Et met tout son orgueil à laisser ses cordages
Reposer sur le pont comme des serpents morts !
Mon navire inutile et superbe sommeille,
Sans que jamais pour un trafic il appareille
Vers quelque port lointain entrevu dans le soir.
Et seul, sans matelots, ayant cargué ses voiles,
Il dérive au milieu d’un mirage d’étoiles
Dans une mer propice à son grand nonchaloir !