Les Œillets rouges

Si j’allais au noir cimetière,
Frère, jetez sur votre soeur,
Comme une espérance dernière,
De rouges œillets tout en fleurs.

Dans les derniers temps de l’Empire,
Lorsque le peuple s’éveillait,
Rouge œillet, ce fut ton sourire
Qui nous dit que tout renaissait.

Aujourd’hui, va fleurir dans l’ombre
Des noires et tristes prisons.
Va fleurir près du captif sombre,
Et dis-lui bien que nous l’aimons.

Dis-lui que par le temps rapide
Tout appartient à l’avenir
Que le vainqueur au front livide
Plus que le vaincu peut mourir.

Collection: 
1850

More from Poet

  • Corrida de Muerte

    Les hauts barons blasonnés d'or,
    Les duchesses de similor,
    Les viveuses toutes hagardes,
    Les crevés aux faces blafardes,
    Vont s'égayer. Ah ! oui, vraiment,
    Jacques Bonhomme est bon enfant.

    C'est du sang vermeil qu'ils vont voir....

  • Sous la fenêtre au noir grillage,
    Sans cesse on entend couler l’eau.
    On se croirait en un village
    Où doucement chante un ruisseau,
    Ou bien dans les bois, sur la mousse,
    Ouïr la source claire et douce
    Qu’aiment le pâtre et le troupeau.
    Ô source, coule,...

  • Si j’allais au noir cimetière,
    Frère, jetez sur votre soeur,
    Comme une espérance dernière,
    De rouges œillets tout en fleurs.

    Dans les derniers temps de l’Empire,
    Lorsque le peuple s’éveillait,
    Rouge œillet, ce fut ton sourire
    Qui nous dit que tout...

  • Dies irœ, Dies illa
    Solvet scelum in favilla.
    Jamais ne viendra donc la fin ?
    Dorment-ils tous, les meurt-de-faim ?
    Jamais, jamais le dernier jour
    Ne les jettera-t-il à leur tour
    Dans les angoisses de la mort,
    Ces bandits que la rage mord ?

    ...

  • Prison de Versailles, 8 septembre 1871

    Passez, passez, heures, journées !
    Que l’herbe pousse sur les morts !
    Tombez, choses à peine nées ;
    Vaisseaux, éloignez-vous des ports ;
    Passez, passez, ô nuits profondes.
    Emiettez-vous, ô vieux monts ;...