Jeune Gaussin, reçois mon tendre hommage,
reçois mes vers au théâtre applaudis ;
protége-les : Zaïre est ton ouvrage ;
il est à toi, puisque tu l’embellis.
Ce sont tes yeux, ces yeux si pleins de charmes,
ta voix touchante, et tes sons enchanteurs,
qui du critique ont fait tomber les armes ;
ta seule vue adoucit les censeurs.
L’illusion, cette reine des coeurs,
marche à ta suite, inspire les alarmes,
le sentiment, les regrets, les douleurs,
et le plaisir de répandre des larmes.
Le dieu des vers, qu’on allait dédaigner,
est, par ta voix, aujourd’hui sûr de plaire ;
le dieu d’amour, à qui tu fus plus chère,
est, par tes yeux, bien plus sûr de régner :
entre ces dieux désormais tu vas vivre.
Hélas ! Longtemps je les servis tous deux :
il en est un que je n’ose plus suivre.
Heureux cent fois le mortel amoureux
qui, tous les jours, peut te voir et t’entendre ;
que tu reçois avec un souris tendre,
qui voit son sort écrit dans tes beaux yeux ;
qui, pénétré de leur feu qu’il adore,
à tes genoux oubliant l’univers,
parle d’amour, et t’en reparle encore !
Et malheureux qui n’en parle qu’en vers !
Épître 38
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