La Fée Arbianne avait deux talismans :
Un Casque d’or qui rendait invisible,
Et, d’autre part, une Épée invincible.
Arbianne avait de même deux amants.
Si je l’en blâme, au moins que l’on m’accorde,
Au lieu d’aller se creuser le cerveau,
Qu’en avoir trois chez nous n’est pas nouveau,
Et qu’aux beaux luths, il n’est point qu’une corde.
Son choix ne fut ni bas ni hasardeux :
Tous deux étaient fils de Roi, dit le conte.
Elle donna l’Épée à l’un pour compte,
Le Casque à l’autre, et les aima tous deux.
— De garde au pied de sa tour d’émeraude,
L’un de l’Épée allait tout pourfendant,
Monstre, dragon, harpie et prétendant,
Et la gardait, en se gardant de fraude.
L’autre invisible allait surprendre ainsi
La Fée à point en son bain d’eau de rose,
Et, comme on dit, ce ne fut point en prose
Qu’il lui conta son amoureux souci.
L’amant au Casque est l’amant qu’on préfère :
Et je déduis d’Amour et de ses lois,
Que vaillants coups d’épée et beaux exploits
Ne valent pas prudence et savoir faire.