Les Lettres

        Hélas ! que voulez-vous de moi,
    Lettres d’amour, plaintes mystérieuses ?
Vous dont j’ai repoussé longtemps avec effroi
        Les prières silencieuses,
Vous m’appelez ... je rêve, et je cherche, en tremblant,
Sur mon cœur, une clef qui jamais ne s’égare :
D’un éclair l’intervalle à présent nous sépare ;
        Mais cet intervalle est brûlant !

Je n’ose respirer ! triste sans amertume,
Au passé, malgré moi, je me sens réunir :
Las d’oppresser mon sein, l’ennui qui me consume
        Va m’attendre dans l’avenir.
Je cède : prends sa place, ô délirante joie !
Laisse fuir la douleur, cache-moi l’horizon :
        Elle t’abandonne sa proie,
        Je t’abandonne ma raison !
Oui, du bonheur vers moi l’ombre se précipite :
De ce pupitre ouvert l’amour s’échappe encor.
        Où va mon âme ? ... elle me quitte ;
Plus prompte que ma vue, elle atteint son trésor !

Il est là ! ... toujours là, sous vos feuilles chéries,
    Frêles garants d’une éternelle ardeur ;
Unique enchantement des tristes rêveries
            Où m’égara mon cœur !
        De sa pensée échos fidèles,
        De ses vœux discrets monuments,
L’Amour, qui l’inspirait, a dépouillé ses ailes
        Pour tracer vos tendres serments.
Soulagement d’un cœur, et délices de l’autre,
Ingénieux langage et muet entretien !
L’empire de l’absence est détruit par le vôtre ;
Je vous lis, mon regard est fixé sur le sien !
Ne renfermez-vous pas la promesse adorée
Qu’il n’aimera que moi ... qu’il aimera toujours ?
        Cette fleur qu’il a respirée,
        Ce ruban qu’il porta deux jours ? ...
Comme la volupté, que j’ai connue à peine,
La fleur exhale encore un parfum languissant ;
        N’est-ce pas sa brûlante haleine ?
N’est-ce pas de son âme un souffle caressant ?
Du ruban qu’il m’offrit que la couleur est belle !
        Le ciel n’a pas un bleu plus pur ;
        Non, des cieux le voile d’azur
        Ne me charmerait pas comme elle !

Qu’ai-je lu ? ... Le voilà, son éternel adieu !
Je touchais au bonheur, il m’en a repoussée ;
En appelant l’espoir, ma langue s’est glacée ;
Et ma froide compagne est rentrée en ce lieu !
Ô constante douleur ! sombre comme la haine,
            Vous voilà de retour !
Prenez votre victime, et rendez-lui sa chaîne ;
Moi, je vous rends un cœur encor tremblant d’amour !

Collection: 
1806

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