La belle Esclave maure

Beau monstre de Nature, il est vrai, ton visage
Est noir au dernier point, mais beau parfaitement :
Et l’Ebène poli qui te sert d’ornement
Sur le plus blanc ivoire emporte l’avantage.

Ô merveille divine, inconnue à notre âge !
Qu’un objet ténébreux luise si clairement ;
Et qu’un charbon éteint, brûle plus vivement
Que ceux qui de la flamme entretiennent l’usage !

Entre ces noires mains je mets ma liberté ;
Moi qui fus invincible à toute autre Beauté,
Une Maure m’embrasse, une Esclave me dompte.

Mais cache-toi, Soleil, toi qui viens de ces lieux
D’où cet Astre est venu, qui porte pour ta honte
La nuit sur son visage, et le jour dans ses yeux.

Collection: 
1621

More from Poet

Auprès de cette grotte sombre
Où l’on respire un air si doux,
L’onde lutte avec les cailloux,
Et la lumière avecque l’ombre.

Ces flots lassés de l’exercice
Qu’ils ont fait dessus ce gravier,
Se reposent dans ce vivier
Où mourut autrefois Narcisse.

...

Je surpris l’autre jour la Nymphe que j’adore
Ayant sur une jupe un peignoir seulement,
Et la voyant ainsi, l’on eût dit proprement
Qu’il sortait de son lit une nouvelle Aurore.

Ses yeux que le sommeil abandonnait encore,
Ses cheveux autour d’elle errant...

Venir à la clarté sans force et sans adresse,
Et n’ayant fait long temps que dormir et manger,
Souffrir mille rigueurs d’un secours estranger
Pour quitter l’ignorance en quittant la foiblesse :

Apres, servir long temps une ingratte Maistresse,
Qu’on ne peut...

Telle qu’était Diane, alors qu’imprudemment
L’infortuné chasseur la voyait toute nue,
Telle dedans un bain Clorinde s’est tenue,
N’ayant le corps vêtu que d’un moite élément.

Quelque dieu dans ces eaux caché secrètement
A vu tous les appas dont la belle est pourvue...

Beau monstre de Nature, il est vrai, ton visage
Est noir au dernier point, mais beau parfaitement :
Et l’Ebène poli qui te sert d’ornement
Sur le plus blanc ivoire emporte l’avantage.

Ô merveille divine, inconnue à notre âge !
Qu’un objet ténébreux luise si...