I
Quand nos aïeux brisèrent leurs entraves,
Ce n’était pas pour se croiser les bras
Pour travailler en maîtres, les esclaves
Ont embrassé, corps à corps, le trépas,
Leur sang, à flots, engraissa nos collines.
A notre tour, jaunes et noirs, allons !
Creusons le sol légué par Dessalines :
Notre fortune est là, dans nos vallons,
Chorus
L’indépendance est éphémère
Sans le droit à l’égalité !
Pour fouler, heureux, cette terre,
Il nous faut la devise austère :
« Dieu ! Le travail ! La liberté ! »
II
De Rochambeau les cohortes altières,
Quelques instants, suspendirent leur feu,
Pour saluer le héros de Vertières,
Capois-La-Mort, grand comme un demi-dieu
Vers le progrès, crions comme ce brave :
« Noirs ! En avant ! En avant ! » Et bêchons
Le sol trempé des sueurs de l’esclave !
Nous avons là ce qu’ailleurs nous cherchons !
Chœur
Sans quoi, tout devient éphémère ;
Pas d’ordre et pas d’égalité !
Pour fouler, heureux, cette terre,
Il nous faut la devise austère:
« Dieu ! Le travail ! La liberté ! »
II
Sang des martyrs dont la pourpre écumante
A secoué nos chaînes et nos jougs !
Chavanne, Ogé, sur la route infamante,
Toi, vieux Toussaint, dans ton cachot de Joux
O précurseurs, dont les dernières fibres
Ont dû frémir, ― vous les porte-flambeaux ―
En nous voyant maintenant fiers et libres,
Conseillez-nous du fond de vos tombeaux !
Chœur
Votre bonheur est éphémère ;
Ayez droit à l’égalité !
Pour fouler, heureux, cette terre,
Il vous faut la devise austère :
« Dieu ! Le travail ! La liberté ! »
III
A l’œuvre donc, descendants de l’Afrique,
Jaunes et noirs, fils du même berceau !
L’antique Europe et la jeune Amérique
Nous voient de loin tenter le rude assaut.
Bêchons le sol qu’en l’an mil huit cent quatre,
Nous ont conquis nos aïeux au bras fort.
C’est notre tour à présent de combattre
Avec ce cri: « Le progrès ou la mort ! »
Chœur
A l’œuvre ! Ou tout est éphémère !
Ayons droit à l’égalité !
Nous foulerons, plus fiers, la terre,
Avec cette devise austère :
« Dieu ! Le travail ! La liberté ! »