Tes sombres anneaux d’améthyste
S’animent et tremblent un peu
Sous la jaune lueur du feu…
Au-dehors la clarté persiste.
Accueillons le songe, donneur
D’enchantements et de féeries…
Mêlons nos âmes attendries
Et parlons de notre bonheur.
Parlons du bonheur, ma très chère,
Comme l’on parle d’un ami,
Evoquant, en l’âtre endormi,
Sa ressemblance familière…
Les choses semblent nous servie
Dans un empressement docile…
Chuchotons : « Mon âme tranquille
N’a plus de rêves d’avenir. »
Le bonheur se fait mieux comprendre
Par les intimités d’hiver,
Lorsque flotte et pleure dans l’air
L’âme du crépuscule tendre.
Le bonheur est tissé d’oubli ;
Il ne connaît pas l’espérance ;
Il ressemble à la délivrance
Après le labeur accompli.
Et c’est le bonheur d’être assises
Toutes deux, auprès du foyer,
Et de voir le feu rougeoyer
En tes calmes prunelles grises.
C’est de taire les vains aveux
Et d’oublier les autres femmes,
En regardant luire les flammes
A travers tes profonds cheveux.
C’est de voir s’embraser l’automne
Dans l’âtre aux multiples reflets
Où croulent des tours, des palais,
Des façades et des colonnes…
Dans mon cœur qui frissonne un peu,
Un sanglot d’autrefois persiste…
Vois comme le bonheur est triste,
Les soirs d’hiver, auprès du feu…