Au rossignol

 
Quand ta voix céleste prélude
Aux silences des belles nuits,
Barde ailé de ma solitude,
Tu ne sais pas que je te suis !

Tu ne sais pas que mon oreille,
Suspendue à ta douce voix,
De l'harmonieuse merveille
S'enivre longtemps sous les bois !

Tu ne sais pas que mon haleine
Sur mes lèvres n'ose passer,
Que mon pied muet foule à peine
La feuille qu'il craint de froisser,

Et qu'enfin un autre poète,
Dont la lyre a moins de secrets,
Dans son âme envie et répète
Ton hymne nocturne aux forêts !

Mais si l'astre des nuits se penche
Aux bords des monts pour t'écouter,
Tu te caches de branche eu branche
Au rayon qui vient y flotter ;

Et si la source qui repousse
L'humble caillou qui l'arrêtait
Elève une voix sous la mousse,
La tienne se trouble et se tait.

Ah! ta voix touchante et sublime
Est trop pure pour ce bas lieu :
Cette musique qui t'anime
Est un instinct qui monte à Dieu.

Tes gazouillements, ton murmure,
Sont un mélange harmonieux
Des plus doux bruits de la nature,
Des plus vagues soupirs des cieux.

Ta voix, qui peut-être s'ignore,
Est la voix du bleu firmament,
De l'arbre, de l'antre sonore,
Du vallon sous l'ombre dormant.

Tu prends les sons que tu recueilles
Dans les gazouillements des flots,
Dans les frémissements des feuilles,
Dans les bruits mourants des échos,

Dans l'eau qui filtre goutte à goutte
Du rocher nu dans le bassin,
Et qui résonne sous sa voûte
En ridant l'azur de son sein,

Dans les voluptueuses plaintes
Qui sortent la nuit des rameaux,
Dans les voix des vagues éteintes
Sur le sable ou dans les roseaux ;

Et de ces doux sons, où se mêle
L'instinct céleste qui t'instruit,
Dieu fît ta voix, ô Philomèle,
Et tu fais ton hymne à la nuit.

Ah! ces douces scènes nocturnes,
Ces pieux mystères du soir,
Et ces fleurs qui penchent leurs urnes
Comme l'urne d'un encensoir,

Ces feuilles où tremblent des larmes,
Ces fraîches haleines des bois,
O nature, avaient trop de charmes
Pour n'avoir pas aussi leur voix !

Et cette voix mystérieuse
Qu'écoutent les anges et moi,
Ce soupir de la nuit pieuse,
Oiseau mélodieux, c'est toi !

Oh ! mêle ta voix à la mienne !
La même oreille nous entend ;
Mais ta prière aérienne
Monte mieux au ciel qui l'attend :

Elle est l'écho d'une nature
Qui n'est qu'amour et pureté,
Le brûlant et divin murmure,
L'hymne flottant des nuits d'été ;

Et nous, dans cette voix sans charmes
Qui gémit en sortant du cœur,
On sent toujours trembler des larmes
Ou retentir une douleur !

 
Quand ta voix céleste prélude
Aux silences des belles nuits,
Barde ailé de ma solitude,
Tu ne sais pas que je te suis !

Tu ne sais pas que mon oreille,
Suspendue à ta douce voix,
De l'harmonieuse merveille
S'enivre longtemps sous les bois !

Tu ne sais pas que mon haleine
Sur mes lèvres n'ose passer,
Que mon pied muet foule à peine
La feuille qu'il craint de froisser,

Et qu'enfin un autre poète,
Dont la lyre a moins de secrets,
Dans son âme envie et répète
Ton hymne nocturne aux forêts !

Mais si l'astre des nuits se penche
Aux bords des monts pour t'écouter,
Tu te caches de branche eu branche
Au rayon qui vient y flotter ;

Et si la source qui repousse
L'humble caillou qui l'arrêtait
Elève une voix sous la mousse,
La tienne se trouble et se tait.

Ah! ta voix touchante et sublime
Est trop pure pour ce bas lieu :
Cette musique qui t'anime
Est un instinct qui monte à Dieu.

Tes gazouillements, ton murmure,
Sont un mélange harmonieux
Des plus doux bruits de la nature,
Des plus vagues soupirs des cieux.

Ta voix, qui peut-être s'ignore,
Est la voix du bleu firmament,
De l'arbre, de l'antre sonore,
Du vallon sous l'ombre dormant.

Tu prends les sons que tu recueilles
Dans les gazouillements des flots,
Dans les frémissements des feuilles,
Dans les bruits mourants des échos,

Dans l'eau qui filtre goutte à goutte
Du rocher nu dans le bassin,
Et qui résonne sous sa voûte
En ridant l'azur de son sein,

Dans les voluptueuses plaintes
Qui sortent la nuit des rameaux,
Dans les voix des vagues éteintes
Sur le sable ou dans les roseaux ;

Et de ces doux sons, où se mêle
L'instinct céleste qui t'instruit,
Dieu fît ta voix, ô Philomèle,
Et tu fais ton hymne à la nuit.

Ah! ces douces scènes nocturnes,
Ces pieux mystères du soir,
Et ces fleurs qui penchent leurs urnes
Comme l'urne d'un encensoir,

Ces feuilles où tremblent des larmes,
Ces fraîches haleines des bois,
O nature, avaient trop de charmes
Pour n'avoir pas aussi leur voix !

Et cette voix mystérieuse
Qu'écoutent les anges et moi,
Ce soupir de la nuit pieuse,
Oiseau mélodieux, c'est toi !

Oh ! mêle ta voix à la mienne !
La même oreille nous entend ;
Mais ta prière aérienne
Monte mieux au ciel qui l'attend :

Elle est l'écho d'une nature
Qui n'est qu'amour et pureté,
Le brûlant et divin murmure,
L'hymne flottant des nuits d'été ;

Et nous, dans cette voix sans charmes
Qui gémit en sortant du cœur,
On sent toujours trembler des larmes
Ou retentir une douleur !

Collection: 
1810

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