LORSQUE je serai mort, ― puisqu’il nous faut mourir, ―
Mon âme reviendra sur la terre souffrir
Avec vous, que l’exil ténébreux enlinceule,
Afin qu’en votre nuit vous ne soyez pas seule.
J’ai trop souvent pleuré vos chagrins ici-bas,
Pour que de l’infini je ne descende pas
Reprendre cette grave et fidèle habitude
D’essuyer vos beaux yeux battus de lassitude.
Vous ne sentirez rien de moi, que mon esprit
Posant sur votre cœur longtemps endolori,
Comme un oiseau de paix ayant fermé ses ailes,
La douceur qui lui vient des choses éternelles.
J’élirai ma demeure en vous ; nous serons deux
Qui, par la même bouche et par les mêmes yeux,
Demanderons l’oubli des maux de cette terre
Et nous regarderons, muets, dans le mystère.
Plus qu’avant, nuit et jour, je vous assisterai.
En m’éloignant, le temps n’aura pas séparé
Mon âme de votre âme adorablement triste,
Et vous sentirez mieux qu’en vous-même j’existe.
Mais si la mort, heureuse aux souffrants, vous saisit,
De moi qui resterai souvenez-vous aussi !