• Ce qui doit m'étonner excite mon courage,
    Et ma témérité me conduit au cercueil ;
    Je sers une beauté plus dure qu'un écueil,
    Et l'amour se conserve où l'espoir fait naufrage.

    Aveugle passion, fureur, manie et rage,
    Vous faites que j'adore un insensible orgueil.
    Le plus cruel abord est comme un doux accueil,
    Et j'appelle un mépris un agréable...

  • Durant la belle nuit, dont mon ame ravie
    Preferoit les clartez à celles d'un beau jour,
    J'escoutois murmurer, au milieu de la Cour,
    Mille voix de loüange, et mille autres d'envie.

    Je ne sçay quelles morts plus douces que la vie,
    Faisoient sentir aux coeurs les charmes de l'Amour ;
    Et de mille beautez qui brilloient à l'entour,
    L'un tenoit pour...

  • Carite pour jamais a quitté ces fontaines,
    Où ses yeux faisaient voir deux soleils dans les eaux.
    Voilà bien le rivage, où parmi les roseaux,
    Les zéphirs, pour l'ouïr, retenaient leurs haleines.

    Voilà bien les forêts, dont les cimes hautaines
    Semblaient porter sa gloire aux célestes flambeaux.
    Mais ces lieux autrefois si plaisants et si beaux
    N'...

  • Carite l'autre jour si pompeuse et si belle,
    De la terre, et du Ciel montroit tous les tresors ;
    Quand je me laissay vaincre aux amoureux transports,
    Qui m'en firent pretendre une faveur nouvelle.

    Mais j'en fus repoussé d'une main si cruelle,
    Et d'un si rude coup je sentis les efforts,
    Que mon ombre craintive erra parmy les morts,
    Preste à passer...

  • Messagers du sommeil, allez à la mal'heure,
    Annoncez le desastre aux coupables humains,
    Et sans nous estonner de vos fantosmes vains,
    Rendez nostre aventure ou douteuse, ou meilleure.

    Apollon ne void point vostre sombre demeure,
    Pour vous communiquer ses Oracles certains.
    Quelle part avons nous à vos antres lointains ?
    Affligez vous Iris, afin qu'...

  • Une fleur passagère, une vaine peinture,
    Faisaient de mes beaux jours les plus douces clartés,
    Et dans un labyrinthe, errant de tous côtés,
    Je faisais de mon sort la douteuse aventure.

    Sans aucun soin du temps, ni de la sépulture,
    La fureur m'emportait parmi les vanités,
    Et toujours soupirant après mille beautés,
    J'écoutais de l'Amour l'agréable...

  • Quand je la vois briller sous un voile funeste,
    Comme une autre Diane, au milieu de la nuit,
    Quelle est mon aventure ? à quoi suis-je réduit ?
    Je demeure confus, sans parole, et sans geste.

    Vous à qui sa rigueur jamais rien ne conteste,
    Vous en qui ma pensée et ma flamme reluit,
    Allez, regards, soupirs, où l'Amour vous conduit :
    Votre douce...

  • La voix qui retentit de l'un à l'autre Pole,
    La terreur et l'espoir des vivans et des morts,
    Qui du rien sçait tirer les esprits et les corps,
    Et qui fit l'Univers, d'une seule parole.

    La voix du Souverain, qui les cedres desole,
    Cependant que l'espine estale ses tresors ;
    Qui contre la cabane espargne ses efforts,
    Et reduit à neant l'orgueil du...

  • L'hiver au doux printemps vient de céder la place,
    Mars de sa tiède haleine a réchauffé l'espace,
    La prairie étale ses fleurs :
    Revenez donc, mes hirondelles,
    Ne me soyez point infidèles,
    Revenez, le bruit de vos ailes
    A l'instant suspendra mes pleurs.

    Laissant au rossignol les arbres du bocage,
    Dans mes vases garnis de fleurs et de feuillage...

  • Quand vous verrez un homme avecque gravité
    En chapeau de clabaud promener sa savate
    Et le col étranglé d'une sale cravate,
    Marcher arrogamment dessus la chrétienté,

    Barbu comme un sauvage et jusqu'aux reins crotté,
    D'un haut de chausse noir sans ceinture et sans patte,
    Et de quelques lambeaux d'une vieille buratte
    En tous temps constamment couvrir...