• Soit que son or se crêpe lentement
    Ou soit qu'il vague en deux glissantes ondes,
    Qui çà, qui là par le sein vagabondes,
    Et sur le col, nagent folâtrement ;

    Ou soit qu'un noeud illustré richement
    De maints rubis et maintes perles rondes,
    Serre les flots de ses deux tresses blondes,
    Mon coeur se plaît en son contentement.

    Quel plaisir est-ce,...

  • Amour tu semble au phalange qui point
    Lui de sa queüe, et toi de ta quadrelle :
    De tous deux est la pointure mortelle,
    Qui rempe au coeur, et si n'aparoist point.

    Sans soufrir mal tu me conduis au point
    De la mort dure, et si ne voy par quelle
    Playe je meurs, ny par quelle moüelle
    Ton venin s'est autour de mon coeur joint.

    Ceus qui se font...

  • J'avoi les yeux et le coeur
    Malades d'une langueur
    L'une à l'autre différente,
    Toujours une fievre ardente
    Le pauvre coeur me bruloit,
    Et toujours l'oeil distiloit
    Une pluye caterreuse,
    Qui s'écoulant dangereuse
    Tout le cerveau m'espuisoit.
    Lors mon coeur aus yeus disoit :

    LE C?UR
    C'est bien raison que sans cesse
    Une pluie...

  • Amelette Ronsardelette,
    Mignonnelette doucelette,
    Treschere hostesse de mon corps,
    Tu descens là bas foiblelette,
    Pasle, maigrelette, seulette,
    Dans le froid Royaume des mors :
    Toutesfois simple, sans relors
    De meurtre, poison, ou rancune,
    Méprisant faveurs et tresors
    Tant enviez par la commune.

    Passant, j'ay dit, suy ta fortune
    Ne...

  • Pren ceste rose aimable comme toy,
    Qui sers de rose aux roses les plus belles,
    Qui sers de fleur aux fleurs les plus nouvelles,
    Qui sers de Muse aux Muses et à moy.

    Pren ceste rose, et ensemble reçoy
    Dedans ton sein mon coeur qui n'a point d'ailes :
    Il vit blessé de cent playes cruelles,
    Opiniastre à garder trop sa foy.

    La rose et moy...

  • Quoy mon ame, dors tu engourdie en ta masse ?
    La trompette a sonné, serre bagage, et va
    Le chemin deserté que Jesuchrist trouva,
    Quand tout mouillé de sang racheta nostre race.

    C'est un chemin facheux borné de peu d'espace,
    Tracé de peu de gens que la ronce pava,
    Où le chardon poignant ses testes esleva,
    Pren courage pourtant, et ne quitte la place....

  • Sur mes vingt ans, pur d'offense et de vice,
    Guidé, mal-caut, d'un trop aveugle oiseau,
    Ayant encore le menton damoiseau,
    Sain et gaillard je vins à ton service.

    Mais, ô cruelle, outré de ta malice,
    Je m'en retourne en une vieille peau,
    En chef grison, en perte de mon beau :
    Tels sont d'Amour les jeux et l'exercice.

    Hélas, que dis-je ! où...

  • Amour, je ne me plains de l'orgueil endurci,
    Ni de la cruauté de ma jeune Lucrèce,
    Ni comme, sans recours, languir elle me laisse :
    Je me plains de sa main et de son godmicy.

    C'est un gros instrument par le bout étréci,
    Dont chaste elle corrompt toute nuit sa jeunesse :
    Voilà contre l'Amour sa prudente finesse,
    Voilà comme elle trompe un amoureux souci...

  • Marie, qui voudrait votre beau nom tourner,
    Il trouverait Aimer : aimez-moi donc, Marie,
    Faites cela vers moi dont votre nom vous prie,
    Votre amour ne se peut en meilleur lieu donner.

    S'il vous plaît pour jamais un plaisir demener,
    Aimez-moi, nous prendrons les plaisirs de la vie,
    Pendus l'un l'autre au col, et jamais nulle envie
    D'aimer en autre lieu...

  • J'ay varié ma vie en devidant la trame
    Que Clothon me filoit entre malade et sain,
    Maintenant la santé se logeoit en mon sein,
    Tantost la maladie extreme fleau de l'ame.

    La goutte ja vieillard me bourrela les veines,
    Les muscles et les nerfs, execrable douleur,
    Montrant en cent façons par cent diverses peines
    Que l'homme n'est sinon le subject de...