• Ce n'est plus le rêveur lunaire du vieil air
    Qui riait aux aïeux dans les dessus de porte ;
    Sa gaîté, comme sa chandelle, hélas! est morte,
    Et son spectre aujourd'hui nous hante, mince et clair.

    Et voici que parmi l'effroi d'un long éclair
    Sa pâle blouse a l'air, au vent froid qui l'emporte,
    D'un linceul, et sa bouche est béante, de sorte
    Qu'il semble...

  • J'ai vu passer dans mon rêve
    - Tel l'ouragan sur la grève, -
    D'une main tenant un glaive
    Et de l'autre un sablier,
    Ce cavalier

    Des ballades d'Allemagne
    Qu'à travers ville et campagne,
    Et du fleuve à la montagne,
    Et des forêts au vallon,
    Un étalon

    Rouge-flamme et noir d'ébène,
    Sans bride, ni mors, ni rêne,
    Ni hop !...

  • Toute grâce et toutes nuances
    Dans l'éclat doux de ses seize ans,
    Elle a la candeur des enfances
    Et les manèges innocents.

    Ses yeux, qui sont les yeux d'un ange,
    Savent pourtant, sans y penser,
    Eveiller le désir étrange
    D'un immatériel baiser.

    Et sa main, à ce point petite
    Qu'un oiseau-mouche n'y tiendrait,
    Captive sans espoir de...

  • Le foyer, la lueur étroite de la lampe ;
    La rêverie avec le doigt contre la tempe
    Et les yeux se perdant parmi les yeux aimés ;
    L'heure du thé fumant et des livres fermés ;
    La douceur de sentir la fin de la soirée ;
    La fatigue charmante et l'attente adorée ;
    De l'ombre nuptiale et de la douce nuit,
    Oh ! tout cela, mon rêve attendri le poursuit
    Sans...

  • L'hiver a cessé : la lumière est tiède
    Et danse, du sol au firmament clair.
    Il faut que le coeur le plus triste cède
    A l'immense joie éparse dans l'air.

    Même ce Paris maussade et malade
    Semble faire accueil aux jeunes soleils,
    Et comme pour une immense accolade
    Tend les mille bras de ses toits vermeils.

    J'ai depuis un an le printemps dans l'...

  • A vous ces vers de par la grâce consolante
    De vos grands yeux où rit et pleure un rêve doux,
    De par votre âme pure et toute bonne, à vous
    Ces vers du fond de ma détresse violente.

    C'est qu'hélas ! le hideux cauchemar qui me hante
    N'a pas de trêve et va furieux, fou, jaloux,
    Se multipliant comme un cortège de loups
    Et se pendant après mon sort qu'il...

  • Le tréteau qu'un orchestre emphatique secoue
    Grince sous les grands pieds du maigre baladin
    Qui harangue non sans finesse et sans dédain
    Les badauds piétinant devant lui dans la boue.

    Le plâtre de son front et le fard de sa joue
    Font merveille. Il pérore et se tait tout soudain,
    Reçoit des coups de pieds au derrière, badin,
    Baise au cou sa commère...

  • Va, chanson, à titre-d'aile
    Au-devant d'elle, et dis-lui
    Bien que dans mon coeur fidèle
    Un rayon joyeux a lui,

    Dissipant, lumière sainte,
    Ces ténèbres de l'amour :
    Méfiance, doute, crainte,
    Et que voici le grand jour !

    Longtemps craintive et muette,
    Entendez-vous ? La gaîté,
    Comme une vive alouette,
    Dans le ciel clair a chanté...

  • Voici des fruits, des fleurs, des feuilles et des branches
    Et puis voici mon coeur qui ne bat que pour vous.
    Ne le déchirez pas avec vos deux mains blanches
    Et qu'à vos yeux si beaux l'humble présent soit doux.

    J'arrive tout couvert encore de rosée
    Que le vent du matin vient glacer à mon front.
    Souffrez que ma fatigue à vos pieds reposée
    Rêve des chers...

  • Elle voulut aller sur les bords de la mer,
    Et comme un vent bénin soufflait une embellie,
    Nous nous prêtâmes tous à sa belle folie,
    Et nous voilà marchant par le chemin amer.

    Le soleil luisait haut dans le ciel calme et lisse,
    Et dans ses cheveux blonds c'étaient des rayons d'or,
    Si bien que nous suivions son pas plus calme encor
    Que le déroulement des...