Stances
Je me répute heureux, pour avoir emporté
À la fin ce portrait, où votre grand beauté
Revit fécondement par la vive peinture
D'un maître très expert, qui dedans son tableau
A si bien retracé votre visage beau
Qu'il semble entièrement ouvrage de Nature.
Qui verrait cette image assise auprès de vous,
Bien qu'elle soit sans âme et...
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Muette Nuit qui de robe embrunie
Vêtis les cieux au mantel étoilé,
Ton noir chariot soit bien vite attelé,
Jà le Soleil sa carrière a fournie.
Avance-toi pour ma joie infinie :
Flore allant voir, je veux être voilé
De ton manteau ; pour mieux être celé,
Or que je vais lui faire compagnie.
Qui veut aimer doit aimer loyaument,
Et ses... -
Quand je vois ma Lucresselette,
Plus mignarde qu'une perlette,
Plus belle qu'un jour gracieux,
Je pense voir une prairie,
La plus belle qui soit fleurie
Dessous le grand manteau des cieux.
Son front qui mon tourment allège,
Et qui est plus blanc que la neige,
Semble être composé de lis,
De lis sont faites ses mains blanches,
Son... -
Hier après dîner, trois heures environ,
Je surpris en dormant dans sa chambre m'amie.
La perleuse sueur de sa face endormie
Allait le long du sein roulante en son giron.
Cupidon l'éventait avec son aileron,
Son sein et sa poitrine était nue à demie,
Tellement qu'on voyait sur sa glace affermie
Ainsi qu'un mont de lait son tétin ferme et rond.... -
Peintre excellent, dont le pinceau subtil
Peut imiter, voire passer Nature,
Se faisant voir inimitable outil
Alors qu'il trace une rare peinture,
Dis-moi, veux-tu sur un tableau tirer
Le gai printemps et son fleuri visage,
Où l'oei1 humain ne cesse de mirer,
Ravi de voir quelque beau paysage ?
Il n'est besoin de peindre soutenu
Le... -
Qui contera le sable de la mer,
Les gouttes d'eau qui sont dans les fontaines,
Sur l'océan les naux* et les antennes**,
Qui contera les maux qu'on a d'aimer,
Qui contera les grains qu'on voit semer
Durant l'automne, et les croupes hautaines
Des monts de Thrace, et par raisons certaines
Les feux des cieux qui pourra tout nommer,
Seul... -
Mère des Dieux, brune chasse-lumière,
Au moite sein, au carrouse tiré
De noirs chevaux, qui du pôle éthéré
Répands un Lèthe à la source sommière,
Déesse Nuit, l'antique et la première,
Que ton char brun de cent feux éclairés
Tombe plus tôt dans le flot azuré,
Brosse plus tôt ta course coutumière.
Sur ton autel dressé comme aux hauts... -
Amour, si de tout temps tu m'as trouvé fidèle,
Amour, si de tout temps je t'ai tant révéré,
Amour, si pour jamais et tant que je pourrai,
Je serai ton soudard targué de ta rondelle,
Madame fais-moi voir, fais que j'approche d'elle
A mon aise et plaisir, ce que j'ai désiré
Depuis jà tant de jours, sans que m'ait éclairé
A mon aise et souhait sa... -
Vous qui voulez savoir que c'est que de l'amour,
Je le vous vais ici tout maintenant décrire.
C'est un vrai doux amer, c'est un triste sourire ;
C'est l'aigle du Caucase et le bourreau vautour.
C'est sans cesse espérer et craindre tour à tour ;
C'est plaindre son malheur et se plaire au martyre ;
C'est sans cesse louer, c'est sans cesse médire ;
C... -
Les champs enfarinés de neige éparpillée
Sont tapissés de blanc, et les arbres couverts
De gros monceaux neigeux tremblent presque à l'envers,
Borée galope en l'air comme à bride avalée.
On marche maintenant sur la Seine gelée,
Et sans crainte de rien on la passe au travers,
Le vent rabat les huis d'un branlement divers,
Au centre de Pluton la...