• LE TUNNEL

    Partout l’œuvre de fer s’exalte et se poursuit.

    Le mont, comme une immense usine, entend, la nuit,
    Sonner les sourds marteaux sur les claires enclumes.
    D’immenses torches d’or dans les sentiers s’allument.
    Bouviers et chevriers les regardent d’en bas
    En ramenant au soir tombant leurs troupeaux...

  • Elle eut trois fils ; tous trois sont tombés à Boncelle.
    Le soir se fait. J’entends parler sa tendre voix.
    Un trop rouge soleil joue encor dans les bois,
    Mais la douceur de l’ombre est flottante autour d’elle.

    Bien que toute heure, hélas ! lui soit une heure triste ;
    Elle ne prétend pas renoncer au malheur
    Dont est lasse sa chair, mais dont est fier son...

  • C’était, dans la campagne émerveillée, un coin,
    Où la prairie au clair brillait comme un visage,
    Où deux grands étangs bleus s’arrondissaient au loin,
    Comme un double baiser du ciel au paysage.

    Sur les mousses de vair et les pierrailles d’or,
    Les eaux, telles des pleurs d’aube s’égouttaient blanches ;
    L’éclair d’un vol d’oiseaux frôlait...

  • Celui qui me lira, dans les siècles, un soir,
    Troublant mes vers, sous leur sommeil ou sous leur cendre,
    Et ranimant leur sens lointain pour mieux comprendre
    Comment ceux d’aujourd’hui s’étaient armés d’espoir,

    Qu’il sache, avec quel violent élan, ma joie
    S’est, à travers les cris, les révoltes, les pleurs,
    Ruée au combat fier et mâle...

  • Et des bouches d’argent et des regards de pierre
    Taisent immensément le glacial mystère
    De ce minuit, dallé d’ennui.

    En des cirques d’éther et d’or, seules et seules,
    Les constellations tournent comme les meules
    De ce minuit, dallé d’ennui

    Des monuments silencieux et des étages
    Se devinent, par au-delà des grands nuages
    De ce minuit, dallé d’...

  • Son grand cœur orageux tonnait en ses paroles
    Et ceux qui l’écoutaient se taisaient devant lui.

    Il n’importait que l’hyperbole
    Enflât parfois de son vain bruit
    Ce qu’il disait, les soirs des...

  • Comme enfermés et secoués

    En un sac invisible,
    Une ronde de moucherons
    Tourne dans le soleil.

    L’après-midi finit : l’air est vermeil.
    Ainsi que de longues glissoires d’or,
    Des bandes de clarté obliques
    Passent entre les troncs
    Et s’étendent sur les gazons.

    Dans un pli de terrain,
    Un fin...

  • Mon cœur? — Il est tombé dans le puits de la mort.
    Et sur le bord de la margelle
    Sur le bord de la vie et de la margelle
    J’entends mon cœur lutter, dans le puits de la mort.

    — Le silence est effrayant —

    Comme un morceau de gel
    La lune aussi, au fond du puits
    Laisse tomber sa pâleur éternelle.

    Mon cœur est un quartier de...

  • Avec, devant les yeux, l’astre qu’était son âme
    Par des chemins de rocs incandescents de flamme,
    Il s’en était allé si loin vers l’inconnu
    Que son siècle vieux et chenu,
    Toussant la mort, au vent trop fort de sa pensée,
    L’avait férocement enseveli sous la risée.

    Il était oublié, depuis des tas d’années
    Vers l’avenir échelonnées,...

  • Un bloc de bronze où son nom luit sur une plaque.

    Ventre riche, mâchoire ardente et menton gourd ;
    Haine et terreur murant son gros front lourd
    Et poing taillé à fendre en deux toutes attaques.

    Le carrefour, solennisé de palais froids,
    D’où ses regards têtus et violents encore
    Scrutent quels feux d’éveil bougent dans telle aurore,
    ...