• Quand, les deux yeux fermés, en un soir chaud d'automne,
    Je respire l'odeur de ton sein chaleureux,
    Je vois se dérouler des rivages heureux
    Qu'éblouissent les feux d'un soleil monotone ;

    Une île paresseuse où la nature donne
    Des arbres singuliers et des fruits savoureux ;
    Des hommes dont le corps est mince et vigoureux,
    Et des femmes dont l'oeil par sa...

  • Il est de forts parfums pour qui toute matière
    Est poreuse. On dirait qu'ils pénètrent le verre.
    En ouvrant un coffret venu de l'Orient
    Dont la serrure grince et rechigne en criant,

    Ou dans une maison déserte quelque armoire
    Pleine de l'âcre odeur des temps, poudreuse et noire,
    Parfois on trouve un vieux flacon qui se souvient,
    D'où jaillit toute vive...

  • Ô Lune qu'adoraient discrètement nos pères,
    Du haut des pays bleus où, radieux sérail,
    Les astres vont se suivre en pimpant attirail,
    Ma vieille Cynthia, lampe de nos repaires,

    Vois-tu les amoureux, sur leurs grabats prospères,
    De leur bouche en dormant montrer le frais émail ?
    Le poète buter du front sur son travail ?
    Ou sous les gazons secs s'...

  • A la pâle clarté des lampes languissantes,
    Sur de profonds coussins tout imprégnés d'odeur
    Hippolyte rêvait aux caresses puissantes
    Qui levaient le rideau de sa jeune candeur.

    Elle cherchait, d'un oeil troublé par la tempête,
    De sa naïveté le ciel déjà lointain,
    Ainsi qu'un voyageur qui retourne la tête
    Vers les horizons bleus dépassés le matin.
    ...

  • La rue assourdissante autour de moi hurlait.
    Longue, mince, en grand deuil, douleur majestueuse,
    Une femme passa, d'une main fastueuse
    Soulevant, balançant le feston et l'ourlet ;

    Agile et noble, avec sa jambe de statue.
    Moi, je buvais, crispé comme un extravagant,
    Dans son oeil, ciel livide où germe l'ouragan,
    La douceur qui fascine et le plaisir qui...

  • La Nature est un temple où de vivants piliers
    Laissent parfois sortir de confuses paroles ;
    L'homme y passe à travers des forêts de symboles
    Qui l'observent avec des regards familiers.

    Comme de longs échos qui de loin se confondent
    Dans une ténébreuse et profonde unité,
    Vaste comme la nuit et comme la clarté,
    Les parfums, les couleurs et les sons se...

  • Entre tant de beautés que partout on peut voir,
    Je comprends bien, amis, que le désir balance ;
    Mais on voit scintiller en Lola de Valence
    Le charme inattendu d'un bijou rose et noir

  • Le regard singulier d'une femme galante
    Qui se glisse vers nous comme le rayon blanc
    Que la lune onduleuse envoie au lac tremblant,
    Quand elle y veut baigner sa beauté nonchalante ;

    Le dernier sac d'écus dans les doigts d'un joueur ;
    Un baiser libertin de la maigre Adeline ;
    Les sons d'une musique énervante et câline,
    Semblable au cri lointain de l'...

  • Je n'ai pas oublié, voisine de la ville,
    Notre blanche maison, petite mais tranquille ;
    Sa Pomone de plâtre et sa vieille Vénus
    Dans un bosquet chétif cachant leurs membres nus,
    Et le soleil, le soir, ruisselant et superbe,
    Qui, derrière la vitre où se brisait sa gerbe,
    Semblait, grand oeil ouvert dans le ciel curieux,
    Contempler nos dîners longs et...

  • Tout là-haut, tout là-haut, loin de la route sûre,
    Des fermes, des vallons, par delà les coteaux,
    Par delà les forêts, les tapis de verdure,
    Loin des derniers gazons foulés par les troupeaux,

    On rencontre un lac sombre encaissé dans l'abîme
    Que forment quelques pics désolés et neigeux ;
    L'eau, nuit et jour, y dort dans un repos sublime,
    Et n'...