• Je vous donne des oeufs. L'oeuf en sa forme ronde
    Semble au Ciel, qui peut tout en ses bras enfermer,
    Le feu, l'air et la terre, et l'humeur de la mer,
    Et sans estre comprins comprend tout en ce monde.

    La taye semble à l'air, et la glère féconde
    Semble à la mer qui fait toutes choses germer :
    L'aubin ressemble au feu qui peut tout animer,
    La coque en...

  • Petit nombril, que mon penser adore,
    Et non mon oeil qui n'eut onques le bien
    De te voir nu, et qui mérites bien
    Que quelque ville on te bâtisse encore ;

    Signe amoureux, duquel Amour s'honore,
    Représentant l'Androgyne lien,
    Combien et toi, mon mignon, et combien
    Tes flancs jumeaux folâtrement j'honore !

    Ni ce beau chef, ni ces yeux, ni ce...

  • Vous me distes, Maitresse, estant à la fenestre,
    Regardant vers Mont-martre et les champs d'alentour :
    La solitaire vie, et le desert sejour
    Valent mieux que la Cour, je voudrois bien y estre.

    A l'heure mon esprit de mes sens seroit maistre,
    En jeusne et oraisons je passerais le jour :
    Je desfirois les traicts et les flames d'Amour
    Ce cruel de mon...

  • Quand je suis vingt ou trente mois
    Sans retourner en Vendômois,
    Plein de pensées vagabondes,
    Plein d'un remords et d'un souci,
    Aux rochers je me plains ainsi,
    Aux bois, aux antres et aux ondes.

    Rochers, bien que soyez âgés
    De trois mil ans, vous ne changez
    Jamais ni d'état ni de forme ;
    Mais toujours ma jeunesse fuit,
    Et la vieillesse...

  • Le boyteus mari de Vénus
    Aveques ses Cyclopes nus
    R'alumoir un jour les flammeches
    De sa forge, à fin d'echaufer
    Une grande masse de fer
    Pour en faire à l'Amour des fleches.

    Venus les trampoit dans du miel,
    Amour les trampoit dans du fiel,
    Quand Mars, retourné des alarmes,
    En se moquant, les meprisoit
    Et branlant son dard, lui disoit :...

  • Je voudrais bien richement jaunissant
    En pluie d'or goutte à goutte descendre
    Dans le beau sein de ma belle Cassandre,
    Lors qu'en ses yeux le somme va glissant.

    Je voudrais bien en taureau blanchissant
    Me transformer pour finement la prendre,
    Quand en avril par l'herbe la plus tendre
    Elle va, fleur, mille fleurs ravissant.

    Je voudrais bien...

  • Tant de fois s'appointer, tant de fois se fascher,
    Tant de fois rompre ensemble et puis se renoüer,
    Tantost blasmer Amour et tantost le loüer,
    Tant de fois se fuyr, tant de fois se chercher,

    Tant de fois se monstrer, tant de fois se cacher,
    Tantost se mettre au joug, tantost le secouer,
    Advouer sa promesse et la desadvouer,
    Sont signes que l'Amour de...

  • Ô doux parler, dont l'appât doucereux
    Nourrit encore la faim de ma mémoire,
    Ô front, d'Amour le Trophée et la gloire,
    Ô ris sucrés, ô baisers savoureux ;

    Ô cheveux d'or, ô côteaux plantureux
    De lis, d'oeillets, de porphyre et d'ivoire,
    Ô feux jumeaux dont le ciel me fit boire
    Ô si longs traits le venin amoureux ;

    Ô vermillons, ô perlettes...

  • J'ai l'esprit tout ennuyé
    D'avoir trop étudié
    Les Phénomènes d'Arate ;
    Il est temps que je m'ébatte
    Et que j'aille aux champs jouer.
    Bons Dieux ! qui voudrait louer
    Ceux qui, collés sus un livre,
    N'ont jamais souci de vivre ?

    Que nous sert l'étudier,
    Sinon de nous ennuyer ?
    Et soin dessus soin accroître
    A nous, qui serons peut-être...

  • Marie, à tous les coups vous me venez reprendre
    Que je suis trop léger, et me dites toujours,
    Quand je vous veux baiser, que j'aille à ma Cassandre,
    Et toujours m'appelez inconstant en amours.

    Je le veux être aussi, les hommes sont bien lourds
    Qui n'osent en cent lieux neuve amour entreprendre.
    Celui-là qui ne veut qu'à une seule entendre,
    N'est pas...