• Sur le vert Hymette, Éros, un matin,
    Dérobait du miel à la ruche attique,
    Mais, voyant le Dieu faire son butin,
    Une prompte abeille accourt et le pique.
    L'enfant tout en pleurs, le Dieu maladroit,
    S'enfuit aussitôt, souffle sur son doigt,
    Et jusqu'à Kypris vole à tire d'aile,
    Oubliant son arc, rouge et courroucé :
    - Ma mère, un petit serpent m'a...

  • Toi dont les yeux erraient, altérés de lumière,
    De la couleur divine au contour immortel
    Et de la chair vivante à la splendeur du ciel,
    Dors en paix dans la nuit qui scelle ta paupière.

    Voir, entendre, sentir ? Vent, fumée et poussière.
    Aimer ? La coupe d'or ne contient que du fiel.
    Comme un Dieu plein d'ennui qui déserte l'autel,
    Rentre et...

  • Le soleil a doré les collines lointaines ;
    Sous le faîte mouillé des bois étincelants
    Sonne le timbre clair et joyeux des fontaines.

    Un chariot massif, avec deux buffles blancs,
    Longe, au lever du jour, la sauvage rivière
    Où le vent frais de l'Est rit dans les joncs tremblants.

    Un jeune homme, vêtu d'une robe grossière,
    Mène paisiblement l'...

  • Comme un morne exilé, loin de ceux que j'aimais,
    Je m'éloigne à pas lents des beaux jours de ma vie,
    Du pays enchanté qu'on ne revoit jamais.
    Sur la haute colline où la route dévie
    Je m'arrête, et vois fuir à l'horizon dormant
    Ma dernière espérance, et pleure amèrement.

    O malheureux ! crois-en ta muette détresse :
    Rien ne refleurira, ton coeur ni ta...

  • (Études latines, I)

    La Jeunesse nous quitte, et les Grâces aussi.
    Les Désirs amoureux s'envolent avec elles,
    Et le sommeil facile. À quoi bon le souci
    Des espérances éternelles ?

    L'aile du vieux Saturne emporte nos beaux jours,
    Et la fleur inclinée au vent du soir se fane ;
    Viens à l'ombre des pins ou sous l'épais platane
    Goûter les...

  • Les moines, à pas lents, derrière le Prieur
    Qui portait le ciboire et les huiles mystiques,
    Rentrèrent, deux à deux, au cloître intérieur,
    Troupeau d'ombres, le long des arcades gothiques.

    Comme en un champ de meurtre, après l'ardent combat,
    Le silence se fit dans la morne cellule,
    Autour du vieil Abbé couché sur son grabat,
    Rigide, à la lueur de...

  • Sentiers furtifs des bois, sources aux frais rivages,
    Et vous, grottes de pampre où glisse un jour vermeil,
    Platanes, qui voyez, sous vos épais feuillages,
    Les vierges de l'Hybla céder au doux sommeil ;

    Un Dieu ne m'endort plus dans vos calmes retraites,
    Quand midi rayonnant brûle les lourds rameaux.
    Ecoutez, ô forêts, mes tristesses secrètes !
    Versez...

  • Kastalides ! chantez l'enfant aux brunes tresses,
    Dont la peau lisse et ferme a la couleur du miel,
    Car vous embellissez la louange, ô Déesses !

    Autour de l'onde où croît le laurier immortel
    Chantez Péristèris née au rocher d'Egine :
    Moins chère est à mes yeux la lumière du ciel !

    Dites son rire frais, plus doux que l'aubergine,
    Le rayon d'or qui...

  • (Études latines, VII)

    Enfant, pour la lune prochaine,
    Pour le convive inattendu !
    Votre amant, Muses, peut sans peine
    Tarir la coupe neuf fois pleine ;
    Mais les Grâces l'ont défendu.

    Inclinez les lourdes amphores,
    Effeuillez la rose des bois !
    Anime tes flûtes sonores,
    Ô Bérécinthe, et ce hautbois !
    C'est à Glycère que je...

  • Au déclin des grandeurs qui dominent la terre
    Quand les cultes divins, sous les siècles ployés,
    Reprenant de l'oubli le sentier solitaire,
    Regardent s'écrouler leurs autels foudroyés ;

    Quand du chêne d'Hellas la feuille vagabonde
    Des parvis désertés efface le chemin
    Et qu'au delà des mers, où l'ombre épaisse abonde,
    Vers un jeune soleil flotte l'esprit...