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    I

    Devant ces deux portraits que j’invoque sans cesse,
    Dans ma chambre où, le soir, un groupe aimé se presse,
    Les enfants, à ma voix doucement apaisés,
    Avaient dit leur prière et reçu nos baisers.
    Resté seul, j’essayais d’utiliser ma veille ;
    Les cris joyeux chantaient encore à mon oreille :
    Mais l’ennui, ce jour-là, mille poids étouffants,...

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    Voix des torrents, des mers, dominant toute voix,
              Pins au large murmure.
    Vous ne dites pas tout, grandes eaux et grands bois,
              Ce que sent la nature.

    Vous n'exhalez pas seuls, ô vastes instruments,
              Ses accords gais ou mornes ;
    Vous ne faites pas seuls, en vos gémissements,
              Parler l'être sans bornes.

    ...
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    I

    Quand la lumière eut percé l’ombre
    Des éléments tumultueux,
    Quand l’homme apparut dans le nombre
    De tes habitants monstrueux,
    O Terre, ô puissante nature,
    Dans cette infime créature
    Qui te contemple avec effroi,
    Dans ce dernier né de la fange,
    Sous la brute as-tu senti l'ange,
    O Terre, as-tu connu ton roi ?

    Perdu...

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    Hier on cueillait à l’arbre une dernière pêche,
    Et ce matin voici, dans l’aube épaisse et fraîche,
    L’automne qui blanchit sur les coteaux voisins.
    Un fin givre a ridé la pourpre des raisins.
    Là-bas voyez-vous poindre, au bout de la montée,
    Les ceps aux feuilles d’or dans la brume argentée ?
    L’horizon s’éclaircit en de vagues rougeurs,
    Et le...

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    Verbe endormi dans la nature,
    Esprits muets au fond des bois,
    Âmes qui n'avez qu'un murmure,
    Prenez dans mes vers une voix.
    Esprits du chêne, esprits des roses,
    Prés en fleurs, sables désolés,
    Lacs souriants, rochers moroses,
    Petits bluets sous les grands blés,
                Parlez !

    Échos des invisibles mondes
    Qu'on découvre...

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    I

    L’AME

    Dans cet air sombre et lourd qui pèse sur nos villes ;
    J’ai peine à soulever le fardeau de mon corps ;
    Courbé sous les douleurs et les travaux serviles,
    Quand j’aspire à monter, je tombe et je m’endors.

    J’entrevois du chemin, en marchant sur la boue,
    Le grand mont qui se dore au soleil printanier ;
    Une chaîne éternelle, et qu’...

  • L'esprit calme des dieux habite dans les plantes.
    Heureux est le grand arbre aux feuillages épais ;
    Dans son corps large et sain la sève coule en paix,
    Mais le sang se consume en nos veines brûlantes.

    A la croupe du mont tu sièges comme un roi ;
    Sur ce trône abrité, je t'aime et je t'envie ;
    Je voudrais échanger ton être avec ma vie,
    Et me dresser...

  • Il est des sources d'eau si bleue et si limpide,
    Que rien n'en peut ternir la transparence humide ;
    Que sur un noir limon leurs ondes de cristal
    Roulent sans altérer l'azur du flot natal ;
    Qu'à travers les débris qui sur leurs bords s'amassent,
    Elles savent choisir les fleurs lorsqu'elles passent,
    Et que, vierges encor de toute impureté,
    L'Océan les...

  • Choeur des Alpes

    Vois ces vierges, là-haut, plus blanches que les cygnes,
    Assises dans l'azur sur les gradins des cieux !
    Viens ! nous invitons l'âme à des fêtes insignes,
    Nous, les Alpes, veillant entre l'homme et les dieux.

    Des amants indiscrets l'abîme nous protège ;
    Notre front n'a rougi qu'aux baisers du soleil,
    Et les rosiers du soir sur...

  • I

    Quand l'homme te frappa de sa lâche cognée,
    Ô roi qu'hier le mont portait avec orgueil,
    Mon âme, au premier coup, retentit indignée,
    Et dans la forêt sainte il se fit un grand deuil.

    Un murmure éclata sous ses ombres paisibles ;
    J'entendis des sanglots et des bruits menaçants ;
    Je vis errer des bois les hôtes invisibles,
    Pour te...