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    Mais c’est dans le malheur que l’amour se révèle.
    (Mme E. de Girardin, Il m’aimait)

     
    Toi qui, par tes vertus, as fait naître en mon âme
    Un sentiment profond, une céleste flamme ;
    Toi qui, par un regard, sais agiter mon cœur,
    Ou le faire renaître à l’espoir, au bonheur ;
    Ô toi, dont un seul mot m’afflige ou me...

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    Seigneur, tu sais combien, avec quel cœur brûlant,
    Ma prière t’invoque pour les êtres étrangers.
    Je viens maintenant te prier pour quelqu’un qui était à moi,
    Qui était mon verre d’eau fraîche, le rayon de miel de ma bouche,

    La chaux de mes os, la douce raison d’être de mes jours,
    Le ramage de mes oreilles, la ceinture de mon vêtement.
    Je me soucie...

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    Je voudrais bien prier, je suis plein de soupirs !
    Ma cruelle raison veut que je les contienne.
    Ni les vœux suppliants d’une mère chrétienne,
    Ni l’exemple des saints, ni le sang des martyrs,

    Ni mon besoin d’aimer, ni mes grands repentirs,
    Ni mes pleurs, n’obtiendront que la foi me revienne.
    C’est une angoisse impie et sainte que la mienne :
    ...

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    Ah ! Si vous saviez comme on pleure
    De vivre seul et sans foyers,
    Quelquefois devant ma demeure
            Vous passeriez.

    Si vous saviez ce que fait naître
    Dans l’âme triste un pur regard,
    Vous regarderiez ma fenêtre
            Comme au hasard.

    Si vous saviez quel baume apporte
    Au cœur la présence d’un cœur,
    Vous vous assoiriez...

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    J’évoque aussi parfois la grande chambre ancienne
    Où nous allions prier pendant les soirs de mai ;
    Comme pour la chaleur on ouvrait la persienne
    L’âme des fleurs passait dans le vent embaumé.

    Une madone blonde ornait la cheminée
    Montrant des doigts son cœur traversé d’un couteau ;
    Des chandeliers d’argent l’avaient illuminée
    Et donnaient de la...

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    Le soir tombe : prions pour les pauvres malades.

    Je songe à ceux qui sont dans leur chambre, reclus
    Les paralytiques, les perclus,
    Ceux qui ne sortiront jamais plus.

    Le soir tombe : prions pour les pauvres malades.

    Pour les irrémédiables phtisiques
    Qui rêvent de candide amour, d’émois physiques,
    Et d’un mariage en musique....

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    Mon père, ayez pitié : ­ la vague s’enfle et gronde,
    La vague est toute prête à déborder sur eux,
    Et leurs tremblantes mains n’osent jeter la sonde,
    Tant le flot se hérisse et tant le gouffre est creux.

    Et comme un vil feuillage à travers la tourmente,
    Ils flottent sans espoir d’un meilleur horizon :
    Ils n’ont plus, pour percer la brume...

  • Lunes du gel dans les grottes de l’or nocturne,
    Glaives d’acier, lames d’argent, pointes de fer,
    Minuit silencieux, qui t’ériges dans l’air
    Comme une volonté dardante et taciturne,

    Voici mon cœur pour les couteaux de tes silences,
    Et mes ardeurs pour tes linceuils et tes tombeaux,
    Minuit clair et lointain, voici pour tes flambeaux
    Mon grand rêve brisé...

  • Que bondisse soudain mon âme aventurière
    Vers l’avenir,
    Et tout à coup je sens encor,
    Comme au temps de l’enfance, au fond de moi, frémir
    ...

  • L’air vibre et s’incendie à l’autre bout du monde ;
    L’air n’est plus qu’asphyxie et tonnerre chez nous ;
    Un ciel empoisonné couvre de ses remous
    Le fleuve bienfaisant et la terre féconde.

    Seigneur ! qu’ils étaient beaux les champs dans le soleil,
    Quand le soir grandissait l’attitude superbe
    D’un travailleur dressant une à une les gerbes
    Avec leur...