Asseyons-nous tous deux près du chemin,
Sur le vieux banc rongé de moisissures,
Et que je laisse, entre tes deux mains sûres,
Longtemps s'abandonner ma main.
Avec ma main qui longtemps s'abandonne
A la douceur de se sentir sur tes genoux,
Mon coeur aussi, mon coeur fervent et doux
Semble se reposer, entre tes deux mains bonnes.
Et c'est la...
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C'était en juin, dans le jardin,
C'était notre heure et notre jour ;
Et nos yeux regardaient, avec un tel amour,
Les choses,
Qu'il nous semblait que doucement s'ouvraient
Et nous voyaient et nous aimaient
Les roses.
Le ciel était plus pur qu'il ne le fut jamais :
Les insectes et les oiseaux
Volaient dans l'or et dans la joie
D'un air... -
Les magasins de la Grand'Place
Mirent leur deuil et leur passé,
Et l'or de leur fronton usé,
Dans les égouts qui les enlacent.
Un drapeau pend comme un haillon,
Au pignon rouge de la Banque ;
L'heure est vieillotte : une dent manque
Au râtelier du carillon.
La pluie, à tomber là, s'ennuie,
Tout son de cloche y semble un glas,... -
Dès le matin, par mes grand'routes coutumières
Qui traversent champs et vergers,
Je suis parti clair et léger,
Le corps enveloppé de vent et de lumière.
Je vais, je ne sais où. Je vais, je suis heureux ;
C'est fête et joie en ma poitrine ;
Que m'importent droits et doctrines,
Le caillou sonne et luit sous mes talons poudreux ;
Je marche... -
Peut-être
Lorsque mon dernier jour viendra,
Peut-être
Qu'à ma fenêtre,
Ne fût-ce qu'un instant,
Un soleil frêle et tremblotant
Se penchera.
Mes mains alors, mes pauvres mains décolorées
Seront quand même encore par sa gloire dorées ;
Il glissera son baiser lent, clair et profond
Une dernière fois, sur ma bouche et mon front,... -
Sous le manteau des toits s'étalaient les greniers
Larges, profonds, avec de géantes lignées
De solives en croix, de poutres, de sommiers,
D'où pendaient à ses fils un peuple d'araignées.
Les récoltes en tas s'y trouvaient alignées :
Les froments par quintaux, les seigles par paniers,
Les orges, de clarté poussiéreuse baignées,
L'avoine et 1e colza... -
En ces villes d'ombre et d'ébène
D'où s'élèvent des feux prodigieux ;
En ces villes, où se démènent,
Avec leurs chants, leurs cris et leurs blasphèmes,
A grande houle, les foules ;
En ces villes soudain terrifiées
De révolte sanglante et de nocturne effroi,
Je sens bondir et s'exalter en moi
Et s'épandre, soudain, mon coeur multiplié.
La... -
Pour que rien de nous deux n'échappe à notre étreinte,
Si profonde qu'elle en est sainte
Et qu'à travers le corps même, l'amour soit clair ;
Nous descendons ensemble au jardin de la chair.
Tes seins sont là ainsi que des offrandes,
Et tes deux mains me sont tendues ;
Et rien ne vaut la naïve provende
Des paroles dites et entendues.
L'ombre... -
Les complaintes qu'on va chantant par la grand'route
Avec leurs vieux refrains de banal désespoir,
Avec leurs mots en panne et leur rythme en déroute,
Sont plus tristes encor, les dimanches, le soir,
A l'heure où vont mourir les tons et les lumières.
Le village, s'endort : la cloche des saluts
Tinte minablement et tinte ; et les chaumières
Qu'on ferme, et... -
C'était un doux pays illuminé de plaines
Où circulaient de longs troupeaux
Dont on voyait les laines
Blanchir les prés et se mirer dans l'eau ;
C'étaient des champs de fleurs à l'infini :
Un fleuve y sinuait de chaumière en chaumière ;
Son cours faisait, au loin, un geste de lumière ;
C'étaient des lacs, cernés de joncs ; tels de grands nids,
Où s'...