Parfois la mort passant devant l?auberge infâme
Cogne ; et la peur gargouille au ventre des laquais...
Les grands vaisseaux d?orgueil pourrissent près des quais.
Et nous n?attendons plus le Dieu né d?une femme.
Orphelins du passé, nous avons tous dans l?âme,
Désertes au soleil, de mornes Palanqués.
Sur l?eau morte des coeurs fiévreux et compliqués
D?...
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Sur la petite place, au lever de l'aurore,
Le marché rit joyeux, bruyant, multicolore,
Pêle-mêle étalant sur ses tréteaux boiteux
Ses fromages, ses fruits, son miel, ses paniers d'oeufs,
Et, sur la dalle où coule une eau toujours nouvelle,
Ses poissons d'argent clair, qu'une âpre odeur révèle.
Mylène, sa petite Alidé par la main,
Dans la foule se fraie avec... -
Nos sens, nos sens divins sont de beaux enfants nus
Jouant aux vagues d?or des vieilles mers païennes,
Innocents, radieux, ivres, les deux mains pleines
Des fruits juteux cueillis aux jardins ingénus.
Pensive et poursuivant ses antiques chimères
L?âme assise non loin surveille leurs ébats ;
Parfois son doigt se lève et commande et, tout bas,
Elle agite... -
Remonte, lent rameur, le cours de tes années,
Et, les yeux clos, suspends ta rame par endroits...
La brise qui s?élève aux jardins d?autrefois
Courbe suavement les âmes inclinées.
Cherche en ton coeur, loin des grand?routes calcinées,
L?enclos plein d?herbe épaisse et verte où sont les croix.
Écoutes-y l?air triste où reviennent les voix,
Et baise au... -
Pour la voir aussitôt m?apparaître, fidèle
Je n?ai qu?à prononcer son nom mélodieux,
Comme si quelque instinct miséricordieux
D?avance lui disait l?heure où j?ai besoin d?elle.
Je la trouve toujours, quand mon coeur contristé
S?exile et se replie au fond de ses retraites,
Et pansant à la nuit ses blessures secrètes,
Reprend avec l?orgueil sa native... -
I
Le fleuve au vent du soir fait chanter ses roseaux.
Seul je m'en suis allé. - J'ai dénoué l'amarre,
Puis je me suis couché dans ma jonque bizarre,
Sans bruit, de peur de faire envoler les oiseaux.
Et nous sommes partis, tous deux, au fil de l'eau,
Sans savoir où, très lentement. - O charme rare,
Que donne un inconnu fluide où l'on s'égare... -
Seul, sur l?horizon bleu vibrant d?incandescence,
L?antique sphinx s?allonge, énorme et féminin.
Dix mille ans ont poussé ; fidèle à son destin,
Sa lèvre aux coins serrés garde l?énigme immense.
De tout ce qui vivait au jour de sa naissance,
Rien ne reste que lui. Dans le passé lointain,
Son âge fait trembler le songeur incertain ;
Et l?ombre de l?... -
C?est un beau soir couleur de rose et d?ambre clair.
Le temple d?Adonis, en haut du promontoire,
Découpe sur fond d?or sa colonnade noire ;
Et la première étoile a brillé sur la mer...
Pendant qu?un roseau pur module un lent accord,
Là-bas, Pan accoudé sur les monts se soulève
Pour voir danser, pieds nus, les nymphes sur la grève ;
Et des vaisseaux d?... -
L?aube d?une clarté s?épanche dans mon âme.
Au mur de l?horizon j?ai vu luire une flamme.
Les lys soudain dans l?ombre ont frémi de ferveur
Et j?ai senti passer la robe du sauveur.
Je suis le voyageur endormi sur la route,
Las et le coeur sinistre, au carrefour du doute,
Suant l?angoisse au fond d?un cauchemar mortel,
Et qui, dans le matin dressé comme... -
L?Homme, puni des dieux parce qu?il a trouvé,
Pareil en sa misère à l?époux de Jocaste,
Marche de siècle en siècle et, las du ciel néfaste,
Demande chaque soir s?il n?est pas arrivé.
Mais, guidant son bâton qui se heurte aux pavés,
Sa fille près de lui glisse, voilée et chaste,
Et, fidèle, accompagne, ainsi qu?un pur constraste,
L?antique désespoir dont...