Un front impérial d'artiste et de poëte,
Occupant à lui seul la moitié de la tête,
Large et plein, se courbant sous l'inspiration,
Qui cache en chaque ride avant l'âge creusée
Un espoir surhumain, une grande pensée,
Et porte écrit ces mots : - Force et conviction. -
Le reste du visage à ce front grandiose
Répondait. - Cependant il avait quelque chose...
-
-
Le monde est méchant, ma petite :
Avec son sourire moqueur
Il dit qu'à ton côté palpite
Une montre en place de coeur.
- Pourtant ton sein ému s'élève
Et s'abaisse comme la mer,
Aux bouillonnements de la sève
Circulant sous ta jeune chair.
Le monde est méchant, ma petite :
Il dit que tes yeux vifs sont morts
Et se meuvent dans leur... -
La lune de ses mains distraites
A laissé choir, du haut de l'air,
Son grand éventail à paillettes
Sur le bleu tapis de la mer.
Pour le ravoir elle se penche
Et tend son beau bras argenté ;
Mais l'éventail fuit sa main blanche,
Par le flot qui passe emporté.
Au gouffre amer pour te le rendre,
Lune, j'irais bien me jeter,
Si... -
15 décembre
Par l'ennui chassé de ma chambre,
J'errais le long du boulevard :
IL faisait un temps de décembre,
Vent froid, fine pluie et brouillard ;
Et là je vis, spectacle étrange,
Échappés du sombre séjour,
Sous la bruine et dans la fange,
Passer des spectres en plein jour.
Pourtant c'est la nuit que les ombres,
Par... -
J'ai dans mon coeur, dont tout voile s'écarte,
Deux bancs d'ivoire, une table en cristal,
Où sont assis, tenant chacun leur carte,
Ton faux amour et mon amour loyal.
J'ai dans mon coeur, dans mon coeur diaphane,
Ton nom chéri qu'enferme un coffret d'or ;
Prends-en la clef, car nulle main profane
Ne doit l'ouvrir ni ne l'ouvrit encor.
... -
A travers les soupirs, les plaintes et le râle
Poursuivons jusqu'au bout la funèbre spirale
De ses détours maudits.
Notre guide n'est pas Virgile le poëte,
La Béatrix vers nous ne penche pas la tête
Du fond du paradis.
Pour guide nous avons une vierge au teint pâle
Qui jamais ne reçut le baiser d'or du hâle
Des lèvres du soleil.
Sa joue est... -
Vous avez un regard singulier et charmant ;
Comme la lune au fond du lac qui la reflète,
Votre prunelle, où brille une humide paillette,
Au coin de vos doux yeux roule languissamment ;
Ils semblent avoir pris ses feux au diamant ;
Ils sont de plus belle eau qu'une perle parfaite,
Et vos grands cils émus, de leur aile inquiète,
Ne voilent qu'à demi... -
Un aveugle au coin d'une borne,
Hagard comme au jour un hibou,
Sur son flageolet, d'un air morne,
Tâtonne en se trompant de trou,
Et joue un ancien vaudeville
Qu'il fausse imperturbablement ;
Son chien le conduit par la ville,
Spectre diurne à l'oeil dormant.
Les jours sur lui passent sans luire ;
Sombre, il entend le monde obscur,
... -
Là-bas, sous les arbres s'abrite
Une chaumière au dos bossu ;
Le toit penche, le mur s'effrite,
Le seuil de la porte est moussu.
La fenêtre, un volet la bouche ;
Mais du taudis, comme au temps froid
La tiède haleine d'une bouche,
La respiration se voit.
Un tire-bouchon de fumée,
Tournant son mince filet bleu,
De l'âme en ce bouge... -
Voilà longtemps que je vous aime :
- L'aveu remonte à dix-huit ans ! -
Vous êtes rose, je suis blême ;
J'ai les hivers, vous les printemps.
Des lilas blancs de cimetière
Prés de mes tempes ont fleuri ;
J'aurai bientôt la touffe entière
Pour ombrager mon front flétri.
Mon soleil pâli qui décline
Va disparaître à l'horizon,
Et sur la...