• Comme tel qui parle de sa mère
    lui ressemble en parlant,
    ce pays ardent se désaltère
    en se souvenant infiniment.

    Tant que les épaules des collines
    rentrent sous le geste commençant
    de ce pur espace qui les rend
    à l'étonnement des origines.

  • Lampe du soir, ma calme confidente,
    mon coeur n'est point par toi dévoilé ;
    (on s'y perdrait peut-être ;) mais sa pente
    du côté sud est doucement éclairée.

    C'est encore toi, ô lampe d'étudiant,
    qui veux que le liseur de temps en temps
    s'arrête, étonné, et se dérange
    sur son bouquin, te regardant.

    (Et ta simplicité supprime un Ange.)

  • Là, sous la treille, parmi le feuillage
    il nous arrive de le deviner :
    son front rustique d'enfant sauvage,
    et son antique bouche mutilée...

    La grappe devant lui devient pesante
    et semble fatiguée de sa lourdeur,
    un court moment on frôle l'épouvante
    de cet heureux été trompeur.

    Et son sourire cru, comme il l'infuse
    à tous les...

  • Ô faisons tout pour cacher son visage
    d'un mouvement hagard et hasardeux,
    il faut le reculer au fond des âges
    pour adoucir son indomptable feu.

    Il vient si près de nous qu'il nous sépare
    de l'être bien-aimé dont il se sert ;
    il veut qu'on touche ; c'est un dieu barbare
    que des panthères frôlent au désert.

    Entrant en nous avec son grand...

  • Cette lumière peut-elle
    tout un monde nous rendre ?
    Est-ce plutôt la nouvelle
    ombre, tremblante et tendre,
    qui nous rattache à lui ?
    Elle qui tant nous ressemble
    et qui tourne et tremble
    autour d'un étrange appui.
    Ombres des feuilles frêles,
    sur le chemin et le pré,
    geste soudain familier
    qui nous adopte et nous mêle
    à la...

  • I

    Ô mélodie de la sève
    qui dans les instruments
    de tous ces arbres s'élève -,
    accompagne le chant
    de notre voix trop brève.

    C'est pendant quelques mesures
    seulement que nous suivons
    les multiples figures
    de ton long abandon,
    ô abondante nature.

    Quand il faudra nous taire,
    d'autres continueront...
    Mais à...

  • Combien a-t-on fait aux fleurs
    d'étranges confidences,
    pour que cette fine balance
    nous dise le poids de l'ardeur.

    Les astres sont tous confus
    qu'à nos chagrins on les mêle.
    Et du plus fort au plus frêle
    nul ne supporte plus

    notre humeur variable,
    nos révoltes, nos cris -,
    sauf l'infatigable table
    et le lit (table...

  • Reste tranquille, si soudain
    l'Ange à ta table se décide ;
    efface doucement les quelques rides
    que fait la nappe sous ton pain.

    Tu offriras ta rude nourriture
    pour qu'il en goûte à son tour,
    et qu'il soulève à sa lèvre pure
    un simple verre de tous les jours.

    Ingénuement, en ouvrier céleste,
    il prête à tout une calme attention ;...

  • Tel cheval qui boit à la fontaine,
    telle feuille qui en tombant nous touche,
    telle main vide, ou telle bouche
    qui nous voudrait parler et qui ose à peine -,

    autant de variations de la vie qui s'apaise,
    autant de rêves de la douleur qui somnole :
    ô que celui dont le coeur est à l'aise,
    cherche la créature et la console.

  • Pourquoi craindrais-je de le dire ?
    C'est Margot qui fixe mon goût :
    Oui, Margot ! cela vous fait rire ?
    Que fait le nom ? la chose est tout.
    Margot n'a pas de la naissance
    Les titres vains et fastueux ;
    Ainsi que ses humbles aïeux,
    Elle est encor dans l'indigence ;
    Et pour l'esprit, quoique amoureux,
    S'il faut dire ce que j'en pense,
    ...