• Que cette glace est belle,
    Qu'elle est nette et fidèle :
    Elle exprime un visage, et ne le flatte point.
    Mais je porte dans l'âme
    Un cristal qui m'enflamme :
    Dieu me sert de miroir, de juge et de témoin.

    Mon miroir quoiqu'utile
    Est un miroir stérile :
    Il ne me fait rien voir que ce qu'il prend de moi.
    Dieu, miroir très sublime,
    En m'...

  • Mon centre est le néant, c'est un vrai lieu de paix.
    L'imposture et l'erreur ne s'y trouvent jamais.
    Lorsque je ne veux rien, l'ennemi se retire,
    Il ne sait où me prendre, il ne sait que me dire.
    Quand il veut raisonner, je ne l'écoute pas,
    Quand il flatte mes sens, je sais me tenir bas.
    Que ce néant est beau ! qu'il est doux et tranquille.
    Ce néant me...

  • Cette claire fontaine,
    Coulant de veine en veine,
    Vient du sein de la mer,
    Et par d'autres canaux rejoint son centre cher.

    Et d'où viens-tu, mon âme ?
    Je me ravis, je pâme :
    C'est de Dieu que tu viens,
    Abîme-toi dans Dieu, l'océan de tes biens.

    Comme cette eau, tu coules,
    Comme cette eau, tu roules,
    Mais par des sentiers faux....

  • Très doux zéphyr qui caresses les fleurs,
    Viens modérer les trop vives chaleurs
    Que je souffre en mon coeur pour le Dieu qui t'anime :
    La douceur de sa paix en ta fraîcheur s'exprime.

    Non, Dieu n'est point dans un orage affreux
    Qui brise un roc et le cèdre orgueilleux ;
    Sans troubler son amour s'insinue en notre âme,
    Et sans la travailler, la...

  • L'homme n'a rien du temps que l'instant qu'il possède,
    Quand le temps est perdu, sa perte est sans remède :
    Après tant d'embarras, tant de peine et de bruit,
    On se trouve à la fin et sans temps et sans fruit.
    Chacun se donne en proie au siècle qui l'entraîne,
    Au plaisir qui l'amuse, au dessein qui le gêne,
    Et comme s'il régnait une fatale loi,
    Chacun...

  • Blancs enfants de choeur de la Lune,
    Et lunologues éminents,
    Leur Église ouvre à tout venant,
    Claire d'ailleurs comme pas une.

    Ils disent, d'un oeil faisandé,
    Les manches très-sacerdotales,
    Que ce bas-monde de scandale
    N'est qu'un des mille coups de dé

    Du jeu que l'Idée et l'Amour,
    Afin sans doute de connaître
    Aussi leur...

  • C'est l'automne, l'automne, l'automne.....
    Le grand vent et toute sa séquelle !
    Rideaux tirés, clôture annuelle !
    Chute des feuilles, des Antigones,
    Des Philomèles,
    Le fossoyeur les remue à la pelle...

    (Mais, je me tourne vers la mer, les Éléments !
    Et tout ce qui n'a plus que les noirs grognements !
    Ainsi qu'un pauvre, un pâle, un piètre...

  • Ah ! tout le long du coeur
    Un vieil ennui m'effleure...
    M'est avis qu'il est l'heure
    De renaître moqueur.

    Eh bien ? je t'ai blessée ?
    Ai-je eu le sanglot faux,
    Que tu prends cet air sot
    De La Cruche cassée ?

    Tout divague d'amour ;
    Tout, du cèdre à l'hysope,
    Sirote sa syncope ;
    J'ai fait un joli four.

  • C'était un très-au vent d'octobre paysage,
    Que découpe, aujourd'hui dimanche, la fenêtre,
    Avec sa jalousie en travers, hors d'usage,
    Où sèche, depuis quand ! une paire de guêtres
    Tachant de deux mals blancs ce glabre paysage.

    Un couchant mal bâti suppurant du livide ;
    Le coin d'une buanderie aux tuiles sales ;
    En plein, le Val-de-Grâce, comme un qui...

  • Vous voyez, la Lune chevauche
    Les nuages noirs à tous crins,
    Cependant que le vent embouche
    Ses trente-six mille buccins !

    Adieu, petits coeurs benjamins
    Choyés comme Jésus en crèche,
    Qui vous vantiez d'être orphelins
    Pour avoir toute la brioche !

    Partez dans le vent qui se fâche,
    Sous la Lune sans lendemains,
    Cherchez la pâtée et...