• Devers Paris, un soir, dans la campagne,
    J’allais suivant l’ornière d’un chemin,
    Seul avec moi, n’ayant d’autre compagne
    Que ma douleur qui me donnait la main.

    L’aspect des champs était sévère et morne,
    En harmonie avec l’aspect des cieux,
    Rien n’était vert sur la plaine sans borne,
    Hormis un parc planté d’arbres très vieux.

    Je regardai bien...

  •  
    En quelque sorte que ce soit, il ne
    lui fut jamais possible de faire retourner le Roy
     ; car il estimoit trop indigne
    du lieu qu’il tenoit et du sang dont il
    estoit sorty, qu’on l’eust veu desmarcher
    un seul pas en arrière.

    Tant que vers le soir, son cheval ayant
    par les janissaires esté tué sous luy, fut
    à la fin mis à...

  • On trouve dans les monts des lacs de quelques toises,
    Purs comme des cristaux, bleus comme des turquoises,
    Joyaux tombés du doigt de l’ange Ithuriel,
    Où le chamois craintif, lorsqu’il vient pour y boire,
    S’imagine, trompé par l’optique illusoire,
                    Laper l’azur du ciel.

    Ces limpides bassins, quand le jour s’y reflète,
    Ont comme la...

  • Amour ! le seul péché qui vaille qu'on se damne,
    - En vain dans ses sermons le prêtre te condamne,
    En vain dans son fauteuil, besicles sur le nez,
    La maman te dépeint comme un monstre à sa fille ;
    - En vain Orgon jaloux ferme sa porte, et grille
    Ses fenêtres. - En vain dans leurs livres mort-nés,
    Contre toi longuement les moralistes crient,
    En vain de...

  • J'aime d'un fol amour les monts fiers et sublimes !
    Les plantes n'osent pas poser leurs pieds frileux
    Sur le linceul d'argent qui recouvre leurs cimes ;
    Le soc s'émousserait à leurs pics anguleux.

    Ni vigne aux bras lascifs, ni blés dorés, ni seigles ;
    Rien qui rappelle l'homme et le travail maudit.
    Dans leur air libre et pur nagent des essaims d'aigles,...

  • J'ai laissé de mon sein de neige
    Tomber un oeillet rouge à l'eau.
    Hélas ! comment le reprendrai-je
    Mouillé par l'onde du ruisseau ?
    Voilà le courant qui l'entraîne !
    Bel oeillet aux vives couleurs,
    Pourquoi tomber dans la fontaine ?
    Pour t'arroser j'avais mes pleurs !

  • Connaissez-vous la blanche tombe
    Où flotte avec un son plaintif
    L'ombre d'un if ?
    Sur l'if, une pâle colombe,
    Triste et seule, au soleil couchant,
    Chante son chant.

    Un air maladivement tendre,
    A la fois charmant et fatal,
    Qui vous fait mal,
    Et qu'on voudrait toujours entendre,
    Un air, comme en soupire aux cieux
    L'ange amoureux...

  • Tout amoureux, de sa maîtresse,
    Sur son coeur ou dans son tiroir,
    Possède un gage qu'il caresse
    Aux jours de regret ou d'espoir.

    L'un d'une chevelure noire,
    Par un sourire encouragé,
    A pris une boucle que moire
    Un reflet bleu d'aile de geai.

    L'autre a, sur un cou blanc qui ploie,
    Coupé par derrière un flocon
    Retors et fin comme la...

  • Les pitons des sierras, les dunes du désert,
    Où ne pousse jamais un seul brin d'herbe vert ;
    Les monts aux flancs zébrés de tuf, d'ocre et de marne,
    Et que l'éboulement de jour en jour décharne,
    Le grès plein de micas papillotant aux yeux,
    Le sable sans profit buvant les pleurs des cieux,
    Le rocher renfrogné dans sa barbe de ronce ;
    L'ardente solfatare...

  • Parfois un enfant trouve une petite graine
    Et tout d'abord, charmé de ses vives couleurs,
    Pour la planter il prend un pot de porcelaine
    Orné de dragons bleus et de bizarres fleurs.

    Il s'en va. La racine en couleuvres s'allonge,
    Sort de terre, fleurit et devient arbrisseau ;
    Chaque jour, plus avant, son pied chevelu plonge,
    Tant qu'il fasse éclater...