• Un nuage est une barre noire
    au-dessus des pins en nuit,
    vers six heures. Le ciel luit
    au fond, comme la mer, le soir.

    Si tu étais une palombe,
    et si j’étais un petit lièvre,
    je me coucherais dans l’ombre
    douce, violette et longue.

    J’aplatirais mes oreilles
    sur mon dos luisant, et toi
    tu avancerais et retirerais
    ton cou bleu...

  • Un poète disait que, lorsqu’il était jeune,
    il fleurissait des vers comme un rosier des roses.
    Lorsque je pense à elle, il me semble que jase
    une fontaine intarissable dans mon cœur.
    Comme sur le lys Dieu pose un parfum d’église,
    comme il met du corail aux joues de la cerise,
    je veux poser sur elle, avec dévotion,
    la couleur d’un parfum qui n’aura pas...

  • Une feuille morte tombe, puis une autre, des platanes
    dont la cime au soleil semble de corne pâle,
    et j’entends des cailloux froids que les hommes cassent.

    Je ne sais où les fleurs du jardin sont allées.
    Sous le frisson brillant de la nuit des rosées,
    les derniers géraniums lourds fleurissent glacés.

    Une enfant rouge est immobile sur la route
    et,...

  • Une goutte de pluie frappe une feuille sèche,
    lentement, longuement, et c’est toujours la même
    goutte, et au même endroit, qui frappe et s’y entête…

    Une larme de toi frappe mon pauvre cœur,
    lentement, longuement, et la même douleur
    résonne, au même endroit, obstinée comme l’heure.

    La feuille aura raison de la goutte de pluie.
    Le cœur aura raison de...

  • La vallée d’Alméria. La vallée d’Alméria
    doit être une vallée en tubéreuse aux eaux d’argent
    et aux montagnes claires et bleues et aux torrents
    pleins de fleurs claires, de grenadiers rouges et luisants.

    La vallée d’Alméria. La vallée d’Alméria
    doit être une vallée où est un château clair,
    des histoires d’amour pleines de seringas,
    de jardins en...

  • Venez sous la tonnelle assombrie de lilas
    afin que je suspende, ainsi qu’une médaille,
    à votre cou pareil à la rousseur du blé
    et au lisse raisin qui dort sur la muraille,
    avec un fil de Vierge une rose bengale…

  • Le vent triste souffle dans le parc,
    comme dans un livre que je lus enfant,
    où une écolière perdue était hagarde.
                                    Le vent.

    Il va casser, peut-être, le tulipier.
    Il fait voir le dessous des feuilles blanc
    du vernis du Japon qu’il semble essuyer,
                                    Le vent.

    Le baromètre est descendu...

  • Neige endolorissante et morne, tu déroules
    Ta nappe liliale au toit cher que je sais,
    Neige endolorissante, ô neige qui t’écroules !

    Et la maison vieillote aux carreaux verts cassés
    A des airs de jeunesse et de pâle frileuse
    Et ne se souvient plus des contes jacassés :

    Des contes jacassés, au soir, par la fileuse,
    En la cuisine antique où le pot...

  • Vieille marine. Enseigne noir galonné d’or
    qui allais observer le passage de Vénus
    et qui mettais la fille du planteur nue,
    dans l’habitation basse, par les nuits chaudes.

    C’était d’une langueur, c’était d’une tiédeur
    de fleurs blanches qui, près de vasières, meurent.
    La bien-aimée était apathique et songeuse,
    avec un collier noir à son cou de...

  •  
    À André Gide.

    Le vieux village était rempli de roses
    et je marchais dans la grande chaleur
    et puis ensuite dans la grande froideur
    de vieux chemins où les feuilles s'endorment.

    Puis je longeai un mur long et usé ;
    c'était un parc où étaient de grands...