• Comme à d'autres, l'heure et l'humeur :
    L'heure morose ou l'humeur malévole
    Nous ont, de leurs sceaux noirs, marqué le coeur,
    Mais, néanmoins, jamais,
    Même les soirs des jours mauvais
    Nos coeurs ne se sont dit les fatales paroles.

    La sincérité claire, ardente, illuminée,
    Nous fut joie et conseil,
    Si bien que notre âme passionnée
    Toujours s'y...

  • Comme aux âges naïfs, je t'ai donné mon coeur,
    Ainsi qu'une ample fleur,
    Qui s'ouvre pure et belle aux heures de rosée ;
    Entre ses plis mouillés ma bouche s'est posée.

    La fleur, je la cueillis avec des doigts de flamme,
    Ne lui dis rien : car tous les mots sont hasardeux
    C'est à travers les yeux que l'âme écoute une âme.

    La fleur qui est mon...

  • Des fleurs fines et mousseuses comme l'écume
    Poussaient au bord de nos chemins
    Le vent tombait et l'air semblait frôler tes mains
    Et tes cheveux avec des plumes.

    L'ombre était bienveillante à nos pas réunis
    En leur marche, sous le feuillage ;
    Une chanson d'enfant nous venait d'un village
    Et remplissait tout l'infini.

    Nos étangs s'étalaient...

  • Le vieux crapaud de la nuit glauque
    Vers la lune de fiel et d'or,
    C'est lui, là-bas, dans les roseaux,
    La morne bouche à fleur des eaux,
    Qui rauque.

    Là-bas, dans les roseaux,
    Ces yeux immensément ouverts
    Sur les minuits de l'univers,
    C'est lui, dans les roseaux,
    Le vieux crapaud de mes sanglots.

    Quand les taches des...

  • N'étant, comme je suis, encore exercité
    Par tant et tant de maux au jeu de la fortune,
    Je suivais d'Apollon la trace non commune,
    D'une sainte fureur saintement agité.

    Ores ne sentant plus cette divinité,
    Mais piqué du souci qui fâcheux m'importune,
    Une adresse j'ai pris beaucoup plus opportune
    A qui se sent forcé de la nécessité.

    Et c'est...

  • Autant comme l'on peut en un autre langage
    Une langue exprimer, autant que la nature
    Par l'art se peut montrer, et que par la peinture
    On peut tirer au vif un naturel visage :

    Autant exprimes-tu, et encor davantage,
    Avecques le pinceau de ta docte écriture,
    La grâce, la façon, le port et la stature
    De celui qui d'Énée a décrit le voyage.
    ...

  • Comme le champ semé en verdure foisonne,
    De verdure se hausse en tuyau verdissant,
    Du tuyau se hérisse en épi florissant,
    D'épi jaunit en grain, que le chaud assaisonne :

    Et comme en la saison le rustique moissonne
    Les ondoyants cheveux du sillon blondissant,
    Les met d'ordre en javelle, et du blé jaunissant
    Sur le champ dépouillé mille gerbes façonne :...

  • Comme l'on voit de loin sur la mer courroucée
    Une montagne d'eau d'un grand branle ondoyant,
    Puis traînant mille flots, d'un gros choc aboyant
    Se crever contre un roc, où le vent l'a poussée :

    Comme on voit la fureur par l'Aquilon chassée
    D'un sifflement aigu l'orage tournoyant,
    Puis d'une aile plus large en l'air s'esbanoyant
    Arrêter tout à coup sa...

  • Baif, qui, comme moi, prouves l'adversité,
    Il n'est pas toujours bon de combattre l'orage,
    Il faut caler la voile, et de peur du naufrage
    Céder à la fureur de Neptune irrité.

    Mais il ne faut aussi par crainte et vilité
    S'abandonner en proie : il faut prendre courage,
    Il faut feindre souvent l'espoir par le visage,
    Et faut faire vertu de la nécessité....

  • Comme on passe en été le torrent sans danger,
    Qui soulait en hiver être roi de la plaine,
    Et ravir par les champs d'une fuite hautaine
    L'espoir du laboureur et l'espoir du berger :

    Comme on voit les couards animaux outrager
    Le courageux lion gisant dessus l'arène,
    Ensanglanter leurs dents, et d'une audace vaine
    Provoquer l'ennemi qui ne se peut venger...