• Filliou*, quand je serai guérie,
    Je ne veux voir que des choses très belles...

    De somptueuses fleurs, toujours fleuries ;
    Des paysages qui toujours se renouvellent,
    Des couchers de soleil miraculeux, des villes
    Pleines de palais blancs, de ponts, de campaniles
    Et de lumières scintillantes... Des visages
    Très beaux, très gais ; des danses
    ...

  • Quand le grand oeil du Ciel tournoyant l'horizon
    Se darde au Capricorne, où sa chaleur passée
    Se retirant de nous rend la terre glacée,
    Et nous fait ressentir l'hivernale saison,

    L'air lui voyant ravir l'amoureuse toison
    De mille et mille fleurs dont elle est tapissée,
    En pleure, et tout dépit d'une humeur amassée,
    Voile son chef doré d'un autre...

  • Quand je suis tout baissé sur votre belle face,
    Je vois dedans vos yeux je ne sais quoi de blanc,
    Je ne sais quoi de noir, qui m'émeut tout le sang,
    Et qui jusques au coeur de veine en veine passe.

    Je vois dedans Amour, qui va changeant de place,
    Ores bas, ores haut, toujours me regardant,
    Et son arc contre moi coup sur coup débandant.
    Las ! si je faux...

  • Quand je te voy seule assise à par-toy,
    Toute amusée avecques ta pensée,
    Un peu la teste encontre bas baissée,
    Te retirant du vulgaire et de moy :

    Je veux souvent pour rompre ton esmoy,
    Te saluer, mais ma voix offensée,
    De trop de peur se retient amassée
    Dedans la bouche, et me laisse tout coy.

    Souffrir ne puis les rayons de ta veuë :
    ...

  • Comme un chevreuil, quand le printemps destruit
    L'oyseux crystal de la morne gelée,
    Pour mieulx brouster l'herbette emmielée
    Hors de son boys avec l'Aube s'en fuit,

    Et seul, et seur, loing de chiens et de bruit,
    Or sur un mont, or dans une vallée,
    Or pres d'une onde à l'escart recelée,
    Libre follastre où son pied le conduit ;

    De retz ne...

  • Quand en songeant ma folâtre j'acolle,
    Laissant mes flancs sur les siens s'allonger,
    Et que, d'un branle habilement léger,
    En sa moitié ma moitié je recolle !

    Amour, adonc si follement m'affole,
    Qu'un tel abus je ne voudroi changer,
    Non au butin d'un rivage étranger,
    Non au sablon qui jaunoie en Pactole.

    Mon dieu, quel heur, et quel...

  • Quand je pense à ce jour, où je la vey si belle
    Toute flamber d'amour, d'honneur et de vertu,
    Le regret, comme un trait mortellement pointu,
    Me traverse le coeur d'une playe eternelle.

    Alors que j'esperois la bonne grace d'elle,
    L'Amour a mon espoir que la Mort combattu :
    La Mort a mon espoir d'un cercueil revestu,
    Dont j'esperois la paix de ma longue...

  • Quand vous serez bien vieille, au soir, à la chandelle,
    Assise aupres du feu, devidant et filant,
    Direz, chantant mes vers, en vous esmerveillant :
    Ronsard me celebroit du temps que j'estois belle.

    Lors, vous n'aurez servante oyant telle nouvelle,
    Desja sous le labeur à demy sommeillant,
    Qui au bruit de mon nom ne s'aille resveillant,
    Benissant vostre...

  • Quand au temple nous serons
    Agenouillés, nous ferons
    Les dévots selon la guise
    De ceux qui pour louer Dieu
    Humbles se courbent au lieu
    Le plus secret de l'église.

    Mais quand au lit nous serons
    Entrelacés, nous ferons
    Les lascifs selon les guises
    Des amants qui librement
    Pratiquent folâtrement
    Dans les draps cent mignardises.
    ...

  • Quand je suis vingt ou trente mois
    Sans retourner en Vendômois,
    Plein de pensées vagabondes,
    Plein d'un remords et d'un souci,
    Aux rochers je me plains ainsi,
    Aux bois, aux antres et aux ondes.

    Rochers, bien que soyez âgés
    De trois mil ans, vous ne changez
    Jamais ni d'état ni de forme ;
    Mais toujours ma jeunesse fuit,
    Et la vieillesse...