• Au fond, la crémaillère avait son croc pendu,
    Le foyer scintillait comme une rouge flaque,
    Et ses flammes, mordant incessamment la plaque,
    Y rongeaient un sujet obscène en fer fondu.

    Le feu s'éjouissait sous le manteau tendu
    Sur lui, comme l'auvent par-dessus la baraque,
    Dont les bibelots clairs, de bois, d'étain, de laque,
    Crépitaient moins aux...

  • Avec ses larges corbillards
    Ornés de plumes majuscules,
    Par les matins, dans les brouillards,
    La mort circule.

    Parée et noire et opulente,
    Tambours voilés, musiques lentes,
    Avec ses larges corbillards,
    Flanqués de quatre lampadaires,
    La Mort s'étale et s'exagère.

    Pareils aux nocturnes trésors,
    Les gros cercueils écussonnés
    -...

  • C'est la bonne heure où la lampe s'allume :
    Tout est si calme et consolant, ce soir,
    Et le silence est tel, que l'on entendrait choir
    Des plumes.

    C'est la bonne heure où, doucement,
    S'en vient la bien-aimée,
    Comme la brise ou la fumée,
    Tout doucement, tout lentement.

    Elle ne dit rien d'abord - et je l'écoute ;
    Et son âme, que j'entends...

  • Lorsque tu fermeras mes yeux à la lumière,
    Baise-les longuement, car ils t'auront donné
    Tout ce qui peut tenir d'amour passionné
    Dans le dernier regard de leur ferveur dernière.

    Sous l'immobile éclat du funèbre flambeau,
    Penche vers leur adieu ton triste et beau visage
    Pour que s'imprime et dure en eux la seule image
    Qu'ils garderont dans le tombeau...

  • L'hiver, quand on fermait,
    A grand bruit lourd, les lourds volets,
    Et que la lampe s'allumait
    Dans la cuisine basse,
    Des pas se mettaient à sonner, des pas, des pas,
    Au long du mur, sur le trottoir d'en face.

    Tous les enfants étaient rentrés,
    Rompant leurs jeux enchevêtrés ;
    Le village semblait un amas d'ombres
    Autour de son clocher,
    D'...

  • La plaine, au loin, est uniforme et morne
    Et l'étendue est vide et grise
    Et Novembre qui se précise
    Bat l'infini, d'une aile grise.

    Sous leurs torchis qui se lézardent,
    Les chaumières, là-bas, regardent
    Comme des bêtes qui ont peur,
    Et seuls les grands oiseaux d'espace
    Jettent sur les enclos sans fleurs
    Le cri des angoisses qui passent....

  • Quatre fossés couraient autour de l'enclos. Or,
    Quand le soleil de Mai, brûlant l'air de ses flammes,
    Sabrait leur eau dormante avec toutes ses lames,
    La ferme s'allumait d'un encadrement d'or.

    Ils s'étendaient, plaqués au bord de mousse verte
    Et de lourds nénuphars étoilant le flot noir.
    Les grenouilles venaient y coasser, le soir,
    L'oeil large...

  • Et voici quelle était la chambre hospitalière
    Où l'étranger trouvait bon gîte et réconfort,
    Où les fils étaient nés, où l'aïeul était mort,
    Où l'on avait tassé ce grand corps dans sa bière.

    Aux kermesses, aux jours de foire et de décor,
    La ferme y célébrait la fête coutumière,
    Et jadis, quand vivait encore la fermière,
    Elle y trônait, au centre,...

  • Un soir plein de clartés et de nuages d'or,
    Du fond des cieux lointains, rayonne au coeur d'un port
    Léger de mâts et lourd de monstrueux navires ;
    L'ombre est de pourpre autour des aigles de l'Empire
    Dont le bronze géant règne sur les maisons.
    On écoute bondir, dans leurs beffrois, les cloches ;
    D'héroïques drapeaux pendent aux frontons proches,
    Et la...

  • Viens lentement t'asseoir
    Près du parterre dont le soir
    Ferme les fleurs de tranquille lumière,
    Laisse filtrer la grande nuit en toi :
    Nous sommes trop heureux pour que sa mer d'effroi
    Trouble notre prière.

    Là-haut, le pur cristal des étoiles s'éclaire :
    Voici le firmament plus net et translucide
    Qu'un étang bleu ou qu'un vitrail d'abside ;...