• Comme des tentes pour les blés
    Les grandes meules fraternelles
    Se rassemblent l'hiver sur les champs isolés
    Et l'autan noir rôde autour d'elles

    Les solides faucheurs du bourg
    Les ont, sous la rude pesée
    De leurs fermes genoux et de leurs coudes lourds,
    Dûment, sur le sol dur, tassées.

    Les grains sont tournés au-dedans,
    Mais au-dehors...

  • Si nos coeurs ont brûlé en des jours exaltants
    D'une amour claire autant que haute,
    L'âge aujourd'hui nous fait lâches et indulgents
    Et paisibles devant nos fautes.

    Tu ne nous grandis plus, ô jeune volonté,
    Par ton ardeur non asservie,
    Et c'est de calme doux et de pâle bonté
    Que se colore notre vie.

    Nous sommes au couchant de ton soleil,...

  • Et c'est au long de ces pays de sépulture,
    En ces marais, qui sont bourbeux depuis mille ans,
    Que j'amarre, ce soir, mon désir d'aventure,
    Comme un brusque voilier fragile et violent.

    J'ai délaissé, là-bas, les quais lointains,
    D'où s'exaltait et naviguait, dans les matins,
    Inassouvie,
    Avec le vieux butin du monde en ses flancs clairs,
    Avec...

  • Je veux mener tes yeux en lent pèlerinage
    Vers ces loins de souffrance, hélas ! où depuis quand,
    Depuis quels jours d'antan, mon coeur fait hivernage !

    C'est mon pays d'immensément,
    Où ne croît rien que du néant,
    Battu de pluie et de grand vent.

    C'est mon pays de long linceul.
    Mes rivières y font de lents serpents
    D'eau jaune à travers de...

  • Je vis l'Ange gardienne en tel jardin s'asseoir
    Sous des nimbes de fleurs irradiantes
    Et des vignes comme en voussoir ;
    Auprès d'elle montaient des héliantes.

    Ses doigts, dont les bagues humbles et frêles
    Entouraient la minceur d'un cercle de corail,
    Tenaient des couples de roses fidèles
    Noués de laine et scellés d'un fermail,

    Un calme,...

  • Sur la route, près des labours,
    Le forgeron énorme et gourd,
    Depuis les temps déjà si vieux, que fument
    Les émeutes du fer et des aciers sur son enclume,
    Martèle, étrangement, près des flammes intenses,
    A grands coups pleins, les pâles lames
    Immenses de la patience.

    Tous ceux du bourg qui habitent son coin,
    Avec la haine en leurs deux poings...

  • L'aube, l'ombre, le soir, l'espace et les étoiles ;
    Ce que la nuit recèle ou montre entre ses voiles,
    Se mêle à la ferveur de notre être exalté.
    Ceux qui vivent d'amour vivent d'éternité.

    Il n'importe que leur raison adhère ou raille
    Et leur tende, debout, sur ses hautes murailles,
    Au long des quais et des havres ses flambeaux clairs ;
    Eux, sont...

  • L'infini tout entier transparaît sous les voiles
    Que lui tissent les doigts des hivers radieux
    Et la forêt obscure et profonde des cieux
    Laisse tomber vers nous son feuillage d'étoiles.
    La mer ailée, avec ses flots d'ombre et de moire,
    Parcourt, sous les feux d'or, sa pâle immensité ;
    La lune est claire et ses rayons diamantés
    Baignent tranquillement le front...

  • S'élargissaient, là-bas, les granges recouvertes,
    Aux murs, d'épais crépis et de blancs badigeons,
    Au faîte, d'un manteau de pailles et de joncs,
    Où mordaient par endroits les dents des mousses vertes.

    De vieux ceps tortueux les ascendaient, alertes,
    Luttant d'assauts avec les lierres sauvageons,
    Et deux meules flanquaient, ainsi que deux donjons,...

  • Combien elle est facilement ravie
    Avec ses yeux d'extase ignée ;
    Elle, la douce et résignée
    Si simplement devant la vie.

    Ce soir, comme un regard la surprenait fervente
    Et comme un mot la transportait
    Au pur jardin de joie, où elle était
    Tout à la fois reine et servante.

    Humble d'elle mais ardente de nous,
    C'était à qui ploierait les...