• Il est doux d'écouter le roseau qui soupire
    Avec d'autres roseaux dans un riant vallon :
    Un front pensif se courbe à ces accords que tire
    Des chênes assemblés le rapide aquilon.

    Mais, qu'auprès de la voix de l'arbre solitaire,
    Les roseaux, la chênaie exhalent un vain bruit,
    Quand sur la triste plaine où descend le mystère,
    Elle lamente au vent qui...

  • Sur la nappe ouvragée où le festin s'exalte,
    La venaison royale alterne aux fruits des îles ;
    Dans les chypres et les muscats de Rivesalte,
    Endormeur des soucis, ô Léthé, tu t'exiles.

    - Mais l'antique hippogriffe au vol jamais fourbu,
    M'a porté sur son aile à la table des dieux ;
    Et là, dans la clarté sidérale, j'ai bu,
    A pleine urne, les flots du...

  • Que l'on jette ces lis, ces roses éclatantes,
    Que l'on fasse cesser les flûtes et les chants
    Qui viennent raviver les luxures flottantes
    A l'horizon vermeil de mes désirs couchants.

    Oh ! Ne me soufflez plus le musc de votre haleine,
    Oh ! Ne me fixez pas de vos yeux fulgurants,
    Car je me sens brûler, ainsi qu'une phalène,
    A l'azur étoilé de ces flambeaux...

  • Le coq chante là-bas ; un faible jour tranquille
    Blanchit autour de moi ;
    Une dernière flamme aux portes de la ville
    Brille au mur de l'octroi.

    Ô mon second berceau, Paris, tu dors encore
    Quand je suis éveillé
    Et que j'entends le pouls de mon grand coeur sonore
    Sombre et dépareillé.

    Que veut-il, que veut-il, ce coeur ? malgré la cendre...

  • Je songe aux ciels marins, à leurs couchants si doux,
    A l'écumante horreur d'une mer démontée,
    Au pêcheur dans sa barque, aux crabes dans leurs trous,
    A Néere aux yeux bleus, à Glaucus, à Protée.

    Je songe au vagabond supputant son chemin,
    Au vieillard sur le seuil de la cabane ancienne,
    Au bûcheron courbé, sa cognée à la main,
    A la ville, à ses...

  • Mélancolique mer que je ne connais pas,
    Tu vas m'envelopper dans ta brume légère
    Sur ton sable mouillé je marquerai mes pas,
    Et j'oublierai soudain et la ville et la terre.

    Ô mer, ô tristes flots, saurez-vous, dans vos bruits
    Qui viendront expirer sur les sables sauvages,
    Bercer jusqu'à la mort mon coeur, et ses ennuis
    Qui ne se plaisent plus qu'...

  • Le grain de blé nourrit et l'homme et les corbeaux.
    L'arbre palladien produit la douce olive,
    Et le triste cyprès, debout sur les tombeaux,
    Balance vainement une cime plaintive.

    Hélas ! N'as-tu point vu ta plus chère amitié
    Etaler à tes yeux la face du vulgaire ?
    Tu ne sais pas languir et souffrir à moitié :
    Quand tu reprends ton coeur, c'est qu'il n'en...

  • Au temps de ma jeunesse, harmonieuse lyre,
    Comme l'eau sous les fleurs, ainsi chantait ta voix ;
    Et maintenant, hélas ! C'est un sombre délire :
    Tes cordes en vibrant ensanglantent mes doigts.

    Le calme ruisselet traversé de lumière
    Reflète les oiseaux et le ciel de l'été,
    Ô lyre, mais de l'eau qui va creusant la pierre
    Au fond d'un antre noir, plus...

  • Ô mer immense, mer aux rumeurs monotones,
    Tu berças doucement mes rêves printaniers ;
    Ô mer immense, mer perfide aux mariniers,
    Sois clémente aux douleurs sages de mes automnes.

    Vague qui viens avec des murmures câlins
    Te coucher sur la dune où pousse l'herbe amère,
    Berce, berce mon coeur comme un enfant sa mère,
    Fais-le repu d'azur et d'effluves salins...

  • Dans l'âtre brûlent les tisons,
    Les tisons noirs aux flammes roses ;
    Dehors hurlent les vents moroses,
    Les vents des vilaines saisons.

    Contre les chenets roux de rouille,
    Mon chat frotte son maigre dos.
    En les ramages des rideaux,
    On dirait un essaim qui grouille :

    C'est le passé, c'est le passé
    Qui pleure la tendresse morte ;
    C'est...