• Ô cœur léger, ô courage mal sûr,
    Penses-tu plus que souffrir je te puisse ?
    Ô bonté creuse, ô couverte malice,
    Traître beauté, venimeuse douceur.

    Tu étais donc toujours sœur de ta sœur ?
    Et moi trop simple il fallait que j’en fisse
    L’essai sur moi ? Et que tard j’entendisse
    Ton parler double et tes chants de chasseur ?

    ...

  • C’était alors, quand les chaleurs passées,
    Le sale Automne aux cuves va foulant,
    Le raisin gras dessous le pied coulant,
    Que mes douleurs furent encommencées.

    Le paisan bat ses gerbes amassées,
    Et aux caveaux ses bouillants muids roulant,
    Et des fruitiers son automne croulant,
    Se venge lors des peines avancées.

    Serait-ce...

  • Ce n’est pas moi que l’on abuse ainsi :
    Qu’à quelque enfant ses ruses on emploie,
    Qui n’a nul goût, qui n’entend rien qu’il oie :
    Je sais aimer, je sais haïr aussi.

    Contente-toi de m’avoir jusqu’ici
    Fermé les yeux, il est temps que j’y voie :
    Et qu’aujourd’hui, las et honteux je sois
    D’avoir mal mis mon temps et mon souci,

    ...

  • Oh l’ai-je dit ? Hélas l’ai-je songé ?
    Ou si pour vrai j’ai dit blasphème-t-elle ?
    S’a fausse langue, il faut que l’honneur d’elle
    De moi, par moi, de sur moi, soit vengé.

    Mon cœur chez toi, ô madame, est logé :
    Là donne-lui quelque gêne nouvelle :
    Fais-lui souffrir quelque peine cruelle :
    Fais, fais-lui tout, fors lui donner congé...

  • Quand à chanter ton los, parfois je m’aventure,
    Sans oser ton grand nom, dans mes vers exprimer,
    Sondant le moins profond de cette large mer,
    Je tremble de m’y perdre, et aux rives m’assure.

    Je crains en louant mal, que je te fasse injure.
    Mais le peuple étonné d’ouïr tant t’estimer,
    Ardent de te connaître, essaie à te nommer,
    Et...

  • Ce dit maint un de moi, de quoi se plaint-il tant,
    Perdant ses ans meilleurs en chose si légère ?
    Qu’a-t-il tant à crier, si encore il espère ?
    Et s’il n’espère rien, pourquoi n’est-il content ?

    Quand j’étais libre et sain j’en disais bien autant.
    Mais certes celui-là n’a la raison entière,
    Ains a le cœur gâté de quelque rigueur fière,...

  • Vous qui aimer encore ne savez,
    Ores m’oyant parler de mon Léandre,
    Ou jamais non, vous y devez apprendre,
    Si rien de bon dans le cœur vous avez,

    Il osa bien branlant ses bras lavés,
    Armé d’amour, contre l’eau se défendre,
    Qui pour tribut la fille voulut prendre,
    Ayant le frère, et le mouton sauvés.

    Un soir vaincu par les...

  • C'est fait mon cœur, quittons la liberté.
    De quoi me huy servirait la défense,
    Que d'agrandir et la peine et l'offense ?
    Plus ne suis fort, ainsi que j'ai été.

    La raison fut un temps de mon côté,
    Or révoltée elle veut que je pense
    Qu'il faut servir, et prendre en récompense
    Qu'onc d'un tel nœud nul ne fut arrêté.

    S'il se...

  • PARDON AMOUR, pardon, ô Seigneur je te voue
    Le reste de mes ans, ma voix et mes écrits,
    Mes sanglots, mes soupirs, mes larmes et mes cris :
    Rien, rien tenir d’aucun que de toi, je n’avoue.

    Hélas comment de moi, ma fortune se joue.
    De toi n’a pas long temps, amour, je me suis ri,
    J’ai failli, je le vois, je me rends, je suis pris.
    J’...

  • Ô vous maudits sonnets, vous qui prîtes l’audace
    De toucher à ma dame : ô malins et pervers,
    Des Muses le reproche, et honte de mes vers :
    Si je vous fis jamais, s’il faut que je me fasse

    Ce tort de confesser vous tenir de ma race,
    Lors pour vous les ruisseaux ne furent pas ouverts
    D’Apollon le doré, des muses aux yeux verts,
    Mais...