• Arrête ! Ecoute-moi, voyageur. Si tes pas
    Te portent vers Cypsèle et les rives de l'Hèbre,
    Cherche le vieil Hyllos et dis-lui qu'il célèbre
    Un long deuil pour le fils qu'il ne reverra pas.

    Ma chair assassinée a servi de repas
    Aux loups. Le reste gît en ce hallier funèbre.
    Et l'Ombre errante aux bords que l'Érèbe enténèbre
    S'indigne et pleure. Nul n'a...

  • Au pommeau de l'épée on lit : Calixte Pape.
    La tiare, les clefs, la barque et le tramail
    Blasonnent, en reliefs d'un somptueux travail,
    Le Boeuf héréditaire armoyé sur la chappe.

    A la fusée, un Dieu païen, Faune ou Priape,
    Rit, engainé d'un lierre à graines de corail ;
    Et l'éclat du métal s'exalte sous l'émail
    Si clair, que l'estoc brille encor...

  • Hujus nam domini colunt me Deumque salutant.
    CATULLE.

    Respecte, ô Voyageur, si tu crains ma colère,
    Cet humble toit de joncs tressés et de glaïeul.
    Là, parmi ses enfants, vit un robuste aïeul ;
    C'est le maître du clos et de la source claire.

    Et c'est lui qui planta droit au milieu de l'aire
    Mon emblème équarri dans un coeur de tilleul ;
    ...

  • Mieux qu'aucun maître inscrit au livre de maîtrise,
    Qu'il ait nom Ruyz, Arphé, Ximeniz, Becerril,
    J'ai serti le rubis, la perle et le béryl,
    Tordu l'anse d'un vase et martelé sa frise.

    Dans l'argent, sur l'émail où le paillon s'irise,
    J'ai peint et j'ai sculpté, mettant l'âme en péril,
    Au lieu de Christ en croix et du Saint sur le gril,
    Ô honte !...

  • Le ciel est clair. La barque a glissé sur les sables.
    Les vergers sont fleuris et le givre argentin
    N'irise plus les prés au soleil du matin.
    Les boeufs et le bouvier désertent les étables.

    Tout renaît. Mais la Mort et ses funèbres fables
    Nous pressent, et, pour toi, seul le jour est certain
    Où les dés renversés en un libre festin
    Ne t'assigneront...

  • Las de poursuivre en vain l'Ophir insaisissable,
    Tu fondas, en un pli de ce golfe enchanté
    Où l'étendard royal par tes mains fut planté,
    Une Carthage neuve au pays de la Fable.

    Tu voulais que ton nom ne fût point périssable,
    Et tu crus l'avoir bien pour toujours cimenté
    A ce mortier sanglant dont tu fis ta cité ;
    Mais ton espoir, soldat, fut bâti...

  • Olim truncus eram ficulnus.
    HORACE.

    A Paul Arène.

    N'approche pas ! Va-t'en ! Passe au large, Étranger !
    Insidieux pillard, tu voudrais, j'imagine,
    Dérober les raisins, l'olive ou l'aubergine
    Que le soleil mûrit à l'ombre du verger ?

    J'y veille. A coups de serpe, autrefois, un berger
    M'a taillé dans le tronc d'un dur figuier d'Égine...

  • A Emmanuel Lansyer.

    Il a compris la race antique aux yeux pensifs
    Qui foule le sol dur de la terre bretonne,
    La lande rase, rose et grise et monotone
    Où croulent les manoirs sous le lierre et les ifs.

    Des hauts talus plantés de hêtres convulsifs,
    Il a vu, par les soirs tempétueux d'automne,
    Sombrer le soleil rouge en la mer qui moutonne ;...

  • L'ivoire est ciselé d'une main fine et telle
    Que l'on voit les forêts de Colchide et Jason
    Et Médée aux grands yeux magiques. La Toison
    Repose, étincelante, au sommet d'une stèle.

    Auprès d'eux est couché le Nil, source immortelle
    Des fleuves, et, plus loin, ivres du doux poison,
    Les Bacchantes, d'un pampre à l'ample frondaison,
    Enguirlandent le joug des...

  • La mousse fut pieuse en fermant ses yeux mornes ;
    Car, dans ce bois inculte, il chercherait en vain
    La Vierge qui versait le lait pur et le vin
    Sur la terre au beau nom dont il marqua les bornes.

    Aujourd'hui le houblon, le lierre et les viornes
    Qui s'enroulent autour de ce débris divin,
    Ignorant s'il fut Pan, Faune, Hermès ou Silvain,
    A son front...