A notre époque froide, on ne fait plus l'amour.
Loin des bois endormeurs et loin des femmes nues
Les pauvres vont, cherchant ces sommes inconnues
Que cachent les banquiers, inquiets nuit et jour.
C'était bien bon l'odeur des pains sortant du four,
C'était bien beau, dans l'ouest, l'éclat doré des nues,
Quand les brumes d'automne étaient déjà venues,
...
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La robe de laine a des tons d'ivoire
Encadrant le buste, et puis, les guipures
Ornent le teint clair et les lignes pures,
Le rire à qui tout sceptique doit croire.
Oh! je ne veux pas fouiller dans l'histoire
Pour trouver les criminelles obscures
Ou les délicieuses créatures
Comme vous, plus tard, couvertes de gloire
Cléopâtre, Hélène et Laure... -
Le russe est froid, presque cruel,
L'allemand chuinte ses consonnes ;
Italie, en vain tu résonnes
De ton baiser perpétuel.
Dans l'anglais il y a du miel,
Des miaulements de personnes
Qui se disent douces et bonnes ;
Ça sert, pour le temps actuel.
Les langues d'orient ? regret
Ou gloussement sans intérêt.
Chère, quand tu m'appelles... -
Il a tout fait, tous les métiers. Sa simple vie
Se passe loin du bruit, loin des cris de l'envie
Et des ambitions vaines du boulevard.
Pour ce jour attendu, qui s'annonce blafard,
Les savants ont prédit, avant l'heure où se couche
Le soleil, une éclipse. Et sa maîtresse accouche,
Apportant un enfant parmi tant de soucis !
Il compte, pour dîner, sur ses... -
Sonnet
Tes yeux, impassibles sondeurs
D'une mer polaire idéale,
S'éclairent parfois des splendeurs
Du rire, aurore boréale.
Ta chevelure, en ces odeurs
Fines et chaudes qu'elle exhale,
Fait rêver aux tigres rôdeurs
D'une clairière tropicale.
Ton âme a ces aspects divers :
Froideur sereine des hivers,
Douceur trompeuse... -
Mon âme est comme un ciel sans bornes ;
Elle a des immensités mornes
Et d'innombrables soleils clairs ;
Aussi, malgré le mal, ma vie
De tant de diamants ravie
Se mire au ruisseau de mes vers.
Je dirai donc en ces paroles
Mes visions qu'on croyait folles,
Ma réponse aux mondes lointains
Qui nous adressaient leurs messages,
Eclairs... -
A Philippe Burty
Le bleu matin
Fait pâlir les étoiles.
Dans l'air lointain
La brume a mis ses voiles.
C'est l'heure où vont,
Au bruit clair des cascades,
Danser en rond,
Sur le pré, les Dryades.
Matin moqueur,
Au dehors tout est rose.
Mais dans mon coeur
Règne l'ennui morose.
Car j'ai parfois
A son bras, à cette... -
Tu dors en croyant que mes vers
Vont encombrer tout l'univers
De désastres et d'incendies ;
Elles sont si rares pourtant
Mes chansons au soleil couchant
Et mes lointaines mélodies.
Mais si je dérange parfois
La sérénité des cieux froids,
Si des sons d'acier ou de cuivre
Ou d'or, vibrent dans mes chansons,
Pardonne ces hautes... -
A Lionel Nunès.
Vivre tranquille en sa maison,
Vertueux ayant bien raison,
Vaut autant boire du poison.
Je ne veux pas de maladie,
Ma fierté n'est pas refroidie,
J'entends la jeune mélodie.
J'entends le bruit de l'eau qui court,
J'entends gronder l'orage lourd,
L'art est long et le temps est court.
Tant mieux,... -
Ma pensée est une églantine
Eclose trop tôt en avril,
Moqueuse au moucheron subtil
Ma pensée est une églantine ;
Si parfois tremble son pistil
Sa corolle s'ouvre mutine.
Ma pensée est une églantine
Eclose trop tôt en avril.
Ma pensée est comme un chardon
Piquant sous les fleurs violettes,
Un peu rude au doux abandon
Ma pensée est...