• À Béranger.

    Jardin si beau devenu sombre,
    Tes fleurs attristent ma raison,
    Qui, semblable au ramier dans l'ombre,
    S'abat au toit de ta prison.
    Mais à rêver j'ai passé l'heure ;
    Vous qui nous épiez d'en bas,
    Ce n'est qu'un pauvre oiseau qui pleure :
    Sentinelle ! Ne tirez pas !

    Au pied des barreaux formidables
    Qui voilent des parents...

  • Toi qui m'as tout repris jusqu'au bonheur d'attendre,
    Tu m'as laissé pourtant l'aliment d'un coeur tendre,
    L'amour ! Et ma mémoire où se nourrit l'amour.
    Je lui dois le passé ; c'est presque ton retour !
    C'est là que tu m'entends, c'est là que je t'adore,
    C'est là que sans fierté je me révèle encore.
    Ma vie est dans ce rêve où tu ne fuis jamais ;
    Il a ta voix...

  • Églantine ! Humble fleur, comme moi solitaire,
    Ne crains pas que sur toi j'ose étendre ma main.
    Sans en être arrachée orne un moment la terre,
    Et comme un doux rayon console mon chemin.
    Quand les tièdes zéphirs s'endorment sous l'ombrage,
    Quand le jour fatigué ferme ses yeux brûlants,
    Quand l'ombre se répand et brunit le feuillage,
    Par ton souffle, vers toi,...

  • Tout ce qu'ont dit les hirondelles
    Sur ce colossal bâtiment,
    C'est que c'était à cause d'elles
    Qu'on élevait un monument.

    Leur nid s'y pose si tranquille,
    Si près des grands chemins du jour,
    Qu'elles ont pris ce champ d'asile
    Pour causer d'affaire, ou d'amour.

    En hâte, à la géante porte,
    Parmi tous ces morts triomphants,
    Sans façon...

  • Il est du moins au-dessus de la terre
    Un champ d'asile où monte la douleur ;
    J'y vais puiser un peu d'eau salutaire
    Qui du passé rafraîchit la couleur.
    Là seulement ma mère encor vivante
    Sans me gronder me console et m'endort ;
    O douce nuit, je suis votre servante :
    Dans votre empire on aime donc encor !

    Non, tout n'est pas orage dans l'orage ;...

  • Au docteur Veyne.

    Si je pouvais trouver un éternel sourire,
    Voile innocent d'un coeur qui s'ouvre et se déchire,
    Je l'étendrais toujours sur mes pleurs mal cachés
    Et qui tombent souvent par leur poids épanchés.

    Renfermée à jamais dans mon âme abattue,
    Je dirais : " Ce n'est rien " à tout ce qui me tue ;
    Et mon front orageux, sans nuage et sans pli...

  • Si tu n'as pas perdu cette voix grave et tendre
    Qui promenait mon âne au chemin des éclairs
    Ou s'écoulait limpide avec les ruisseaux clairs,
    Eveille un peu ta voix que je voudrais entendre.

    Elle manque à ma peine, elle aiderait mes jours.
    Dans leurs cent mille voix je ne l'ai pas trouvée.
    Pareille à l'espérance en d'autres temps rêvée,
    Ta voix ouvre une...

  • Horloge d'où s'élançait l'heure
    Vibrante en passant dans l'or pur,
    Comme l'oiseau qui chante ou pleure
    Dans un arbre où son nid est sûr,
    Ton haleine égale et sonore
    Dans le froid cadran ne bat plus :
    Tout s'éteint-il comme l'aurore
    Des beaux jours qu'à ton front j'ai lus ?

  • Hirondelle ! hirondelle ! hirondelle !
    Est-il au monde un coeur fidèle ?
    Ah ! s'il en est un, dis-le moi,
    J'irai le chercher avec toi.

    Sous le soleil ou le nuage,
    Guidée à ton vol qui fend l'air,
    Je te suivrai dans le voyage
    Rapide et haut comme l'éclair.
    Hirondelle ! hirondelle ! hirondelle !
    Est-il au monde un coeur fidèle ?
    Ah ! s'il...

  • Tu crois, s'il fait sombre,
    Qu'on ne te voit pas,
    Non plus qu'une autre ombre,
    Glissant sur tes pas ?
    Mais l'air est sonore,
    Et ton pied bondit...
    Ne fuis pas encore :
    Je n'ai pas tout dit !
    À qui ce gant rose
    Qui n'est pas le mien ?
    Quel parfum t'arrose,
    Qui n'est plus le tien ?
    Tu ris, mais prends garde,
    Ta lèvre pâlit...
    ...