•  
    Sa tête a l’air d’être en bois peint,
    Malgré ses mandibules moites ;
    Elle a l’œil gros comme un pépin.
    Pareille aux bêtes en sapin,
    Mouton, cheval, bœuf et lapin,
    Que les enfants ont dans des boîtes,
    Sa tête a l’air d’être en bois peint,
    Malgré ses mandibules moites.

    Grise, elle a les ailes doublées
    De rouge antique ou de bleu...

  • Voûté haut sur la grande chèvre
    Enchaînant un frêne équarri,
    Le vieux parle, et son gars contrit
    L’écoute, en se mordant la lèvre.

    « T’es trop vif ! Dans not’ dur métier,
    Pas s’presser soulag’ de moitié.
    L’corps joue à l’ais’, n’est jamais raide,
    Quand la cadenc’ tranquill’ vous aide.

    Comprends-moi donc ! membr’, scie, échines,
    Les trois...

  •  
    J’ai fait ces vers subtils, polis comme des bagues,
    Pour immortaliser la gloire de tes seins
    Que mon houleux désir bat toujours de ses vagues.

    Qu’ils y fleurissent donc éternellement sains,
    Et que dans la roideur fière des pics de glace
    Ils narguent à jamais les siècles assassins !

    Sur ta chemise, enfant, mon œil baise la place
    Qu’use le...

  •  
    Auprès d’une rivière où des broussailles trempent,
    Dans des chemins perdus, monticuleux et roux,
    On les voit se traîner aux abords de leurs trous,
    Onduleux chapelets de vertèbres qui rampent.

    Oh, le serpent ! Le si fantastique animal
    Qui surgit brusquement des feuilles ou des pierres
    Et qui laisse couler de ses yeux sans paupières
    La lueur...

  • En regardant sauter les geais
    Sur les hautes branches d’un chêne,
    Délivré du spleen qui m’enchaîne,
    Béatement je m’allongeais.

    Oh ! comme alors je me plongeais
    Dans la quiétude sereine,
    En regardant sauter les geais
    Sur les hautes branches d’un chêne !

    Et, sans traiter un des sujets
    Dont j’avais la cervelle pleine,
    J’attendais que...

  •  
    Le silence est l’âme des choses
    Qui veulent garder leur secret.
    Il s’en va quand le jour paraît,
    Et revient dans les couchants roses.

    Il guérit des longues névroses,
    De la rancune et du regret.
    Le silence est l’âme des choses
    Qui veulent garder leur secret.

    À tous les parterres de roses
    Il préfère un coin de forêt
    Où la lune...

  •  
    On scrute leur portrait, espérant qu’il en sorte
    Un cri qui puisse enfin nous servir de flambeau.
    Ah ! si même ils venaient pleurer à notre porte
    Lorsque le soir étend ses ailes de corbeau !

    Non ! Mieux que le linceul, la bière et le tombeau
    Le silence revêt ceux que le temps emporte :
    L’âme en fuyant nous laisse un horrible lambeau
    Et ne nous...

  •  
    De grêles horizons noyés d’un brouillard bleu
    Et plaquant tout autour leur bordure inégale
    Sur un ciel moite et bas d’où pourtant rien ne pleut,
    D’un nuageux funèbre où du gris s’intercale ;

    Là-bas, très loin, partout, sous les buissons givrés,
    Si chenus que le vent ne pourrait plus les tondre,
    Par morceaux, d’un blanc sale, aux lisières des prés,...

  •  
    Le Soleil, ami du serpent
    Et couveur de la pourriture,
    Est le brasier que la Nature
    Tous les jours allume et suspend.

    Le malade, clopin-clopant,
    Va chercher, quand il s’aventure,
    Le Soleil ami du serpent
    Et couveur de la pourriture.

    L’enveloppé, l’enveloppant,
    Tout subit sa grande friture ;
    Et jusque dans la sépulture,...

  • Sur les rocs, comme au ciel, le monarque du feu
    Se donne, ici, libre carrière.
    L’œil cuit, caché sous la paupière,
    Aux fulgurants reflets du grisâtre et du bleu.

    Fourmillements d’éclairs de miroirs...