• L’aube est volcan ; midi, fournaise ; août fait éclore
    Comme un embrasement le baiser de l’été ;
    Il ruisselle des cieux, écrasante clarté ;
    L’horizon le déchaîne, orageux météore.

    Que faire par ce temps de chaleur qui dévore ?
    S’étendre au cours de l’eau dans un bois écarté,
    Tandis que sur le chêne, en dôme frais voûté,
    La cigale emplit l’air de sa...

  • Non loin du pavillon que les fleurs ont caché,
    Les jasmins en grimpant avec le chèvrefeuille,
    Couvrent le frais berceau que nous avons cherché
    Afin que notre amour s’y tienne et s’y recueille.

    L’ombre du mur voisin vient tomber à nos pieds
    Un rayon en tremblant sur ta jupe se pose.
    Le vent derrière toi, pendant que tu t’assieds,
    Balance les lilas et...

  • Des Groënlands et des Norvèges
    Vient-elle avec Seraphita ?

    C’est un parc scandinave, aux sapins toujours verts,
    Où le vent automnal courbe les fleurs d’hivers
    Dans les vases de marbre anciens sur la terrasse ;
    Et la vierge royale en qui revit la race
    Des brumeux Suénon dont son père descend,
    L’...

  • Oh ! les longs, longs baisers sur sa bouche et ses yeux,
    La chair mordue ainsi qu’un fruit délicieux,
    Et le matin, le lent enroulement des tresses,
    Les regards échangeant leurs dernières caresses,
    Les angoisses, le soir, situ ne venais pas,
    Ou les bonds de mon cœur quand j’entendais tes pas :
    Vision du passé, pourquoi m’être apparue
    Devant les deux...

  • La pleine mer moutonne au loin sur les brisants.
    Dans les rocs qu’ont usés les flots et les jusants,
    La lame écume et bout au pied de la falaise ;
    Et, debout dans le vent, la jeune Granvillaise,
    Un bras devant les yeux, regarde à l’horizon,
    Car l’équinoxe approche et voici la saison
    Où la côte normande a le plus de naufrages ;
    Et les gens sont au large...

  • Le ciel est pâle, et la rosée
    Jaillit partout, perle posée
    A la pointe du gazon vert.

    Les lointains ont des tons de mauve,
    La feuille prend sa couleur fauve,
    Dernier feuillet du livre ouvert.

    La vendange est faite en Bourgogne ;
    L’année a fini sa besogne,
    Le temps a filé son linceul ;
    La blonde automme échevelée,
    Ainsi qu’une reine...

  • La coupe où sans regret tu versas l’affreux vin
    Reste la coupe d’or d’un échanson divin !

    La nuit qui scintillait quand nous nous séparâmes
    Reste l’ombre étoilée où montaient nos deux âmes !

    La fleur qui mourra loin de tes profonds cheveux
    Reste l’œillet béni qui servait les aveux !

    Le vent qui passe et prend le baiser qu’on oublie
    Reste le messager...

  • La vie et la douleur m’ont appris la sagesse,
    La voici : l’amour est mortel.
    Il meurt même avant nous, et l’homme, en sa détresse,
    N’a point d’ennemi plus cruel.

    Qu’est-ce donc que la vie ?...

  • L’Europe renaissait, et la pensée humaine
    Si longtemps prisonnière allait rompre sa chaîne ;
    Jours de lutte et de sang pleins d’ombre et de soleil.
    Déjà la Renaissance et son éclat vermeil
    Avaient illuminé la nuit sombre du cloître.
    L’esprit voulait enfin s’affranchir et s’accroître ;
    Et, bravant l’Empereur, et le Pape, et l’Enfer,
    De sa voix d’ouragan...

  • O pauvre oiseau blessé, mis à mort par la vie !
    Cœur qui battais trop fort, cœur trop doux et trop fier,
    Te voilà replié sous ton aile engourdie
    Et tu ne sais plus rien des souffrances d’hier.

    Quoi ! la rigidité ! Quoi ! la paix immobile !
    Quoi ! le combat cessé ! Quoi ! la trêve de Dieu !
    O lutteur désarmé de ta force inutile
    Et qui te réservais ton...