I
... Ces souvenirs chauffent mon sang
Et pénètrent mes moelles...
Je me souviens du village près de l'Escaut,
D'où l'on voyait les grands bateaux
Passer, ainsi qu'un rêve empanaché de vent
Et merveilleux de voiles,
Le soir, en cortège, sous les étoiles.
Je me souviens de la bonne saison ;
Des parlottes, l'été, au seuil de la...
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Depuis que dans la plaine immense il s'est fait soir,
Avec de lourds marteaux et des blocs taciturnes,
L'ombre bâtit ses murs et ses donjons nocturnes
Comme un Escurial revêtu d'argent noir.
Le ciel prodigieux domine, embrasé d'astres,
- Voûte d'ébène et d'or où fourmillent des yeux -
Et s'érigent, d'un jet, vers ce plafond de feux,
Les hêtres et... -
Sur ces plages de sel amer
Et d'âpre immensité marine,
Je déguste, par les narines,
L'odeur d'iode de la mer.
Quels échanges de forces nues
S'entrecroisent et s'insinuent,
Avec des heurts, avec des bonds,
A cette heure de vie énorme,
Où tout s'étreint et se transforme
Les vents, les cieux, les flots, les monts !
Et c'est... -
Sur une table chargée, où les liasses abondent,
Serré dans un fauteuil étroit, morne et branlant,
Il griffonne menu, au long d'un papier blanc ;
Mais sa pensée, elle est là-bas au bout du monde.
Le Cap, Java, Ceylan vivent devant ses yeux
Et l'océan d'Asie, où ses mille navires
A l'Est, à l'Ouest, au Sud, au Nord, cinglent et virent
Et, les voiles... -
Parmi les pommes d'or que frôle un vent léger
Tu m'apparais là-haut, glissant de branche en branche,
Lorsque soudain l'orage accourt en avalanche
Et lacère le front ramu du vieux verger.
Tu fuis craintive et preste et descends de l'échelle
Et t'abrites sous l'appentis dont le mur clair
Devient livide et blanc aux lueurs de l'éclair
Et dont sonne... -
La ferme aux longs murs blancs, sous les grands arbres jaunes,
Regarde, avec les yeux de ses carreaux éteints,
Tomber très lentement, en ce jour de Toussaint,
Les feuillages fanés des frênes et des aunes.
Elle songe et resonge à ceux qui sont ailleurs,
Et qui, de père en fils, longuement s'éreintèrent,
Du pied bêchant le sol, des mains fouillant la... -
Par les chemins bordés de pueils
Rôde en maraude
Le donneur de mauvais conseils.
La vieille carriole aux tons groseille
Qui l'emmena, on ne sait d'où,
Une folle la garde et la surveille,
Au carrefour des chemins mous.
Le cheval paît l'herbe d'automne,
Près d'une mare monotone,
Dont l'eau livide réverbère
Le ciel de pluie et de misère... -
Les baisers morts des défuntes années
Ont mis leur sceau sur ton visage,
Et, sous le vent morne et rugueux de l'âge,
Bien des roses, parmi tes traits, se sont fanées.
Je ne vois plus ta bouche et tes grands yeux
Luire comme un matin de fête,
Ni, lentement, se reposer ta tête
Dans le jardin massif et noir de tes cheveux.
Tes mains chères... -
Quand tu marches, le pas rythmé, le long des champs,
Aime à nommer pour te plaire à toi-même
Le sud, l'ouest, l'est, le nord,
Mots clairs et doux, mots terribles et forts,
Qui décorent les beaux poèmes.
Qu'ils t'évoquent les bois, les monts et le soleil ;
Qu'ils t'évoquent la mer et le grand port vermeil
Illuminant là-bas les confins de la terre ;... -
Il est des moines doux avec des traits si calmes,
Qu'on ornerait leurs mains de roses et de palmes,
Qu'on formerait, pour le porter au-dessus d'eux,
Un dais pâlement bleu comme le bleu des cieux,
Et pour leurs pas foulant les plaines de la vie,
Une route d'argent d'un chemin d'or suivie.
Et par les lacs, le long des eaux, ils s'en iraient,...