• L'homme a dit : "Les cieux m'environnent,
    Les cieux ne roulent que pour moi ;
    De ces astres qui me couronnent
    La nature me fit le roi :
    Pour moi seul le soleil se lève,
    Pour moi seul le soleil achève
    Son cercle éclatant dans les airs ;
    Et je vois, souverain tranquille,
    Sur son poids la terre immobile
    Au centre de cet univers."

    Fier mortel...

  • Je me trouve et me pers, je m'asseure et m'effroye
    En ma mort je revis je vois sans penser voir,
    Car tu as d'éclairer et d'obscurcir pouvoir,
    Mais tout orage noir de rouge eclair flamboye.

    Mon front qui cache et monstre avec tristesse, joye,
    Le silence parlant, l'ignorance au sçavoir,
    Tesmoignent mon hautain et mon humble devoir,
    Tel est tout coeur, qu'...

  • Vous, ô Dieux, qui à vous presque égalé m'avez,
    Et qu'on feint comme moy serfs de la Cyprienne :
    Et vous doctes amans, qui d'ardeur Delienne
    Vivans par mille morts vos ardeurs écrivez :

    Vous esprits que la mort n'a point d'amour privez,
    Et qui encor au frais de nombre Elysienne
    Rechantans par vos vers vostre flamme ancienne,
    De vos Palles moitiez les...

  • Dès que ce Dieu soubs qui la lourde masse,
    De ce grand Tout brouillé s'écartela,
    Les cieux plus hauts clairement étoila,
    Et d'animaulx remplit la terre basse :

    Et dès que l'homme au portrait de sa face
    Heureusement sur la terre il moula,
    Duquel l'esprit presqu'au sien égala,
    Heurant ainsi sa prochaine race :

    Helas ! ce Dieu, helas ! ce Dieu...

  • Quelque lieu, quelque amour, quelque loi qui t'absente,
    Et ta déité tâche ôter de devant moi,
    Quelque oubli qui, contraint de lieu, d'amour, de loi,
    Fasse qu'en tout absent de ton coeur je me sente,

    Tu m'es, tu me seras sans fin pourtant présente
    Par le nom, par l'effet fatal qui est en toi,
    Par tout tu es Diane, en tout rien je ne vois,
    Qui mon...

  • Ou soit que la clairté du soleil radieux
    Reluise dessus nous, ou soit que la nuict sombre
    Luy efface son jour, et de son obscur ombre
    Renoircisse le rond de la voulte des cieux :

    Ou soit que le dormir s'escoule dans mes yeux,
    Soit que de mes malheurs je recherche le nombre,
    Je ne puis eviter à ce mortel encombre,
    Ny arrester le cours de mon mal...

  • Comme un qui s'est perdu dans la forest profonde
    Loing de chemin, d'orée et d'adresse, et de gens :
    Comme un qui en la mer grosse d'horribles vens,
    Se voit presque engloutir des grans vagues de l'onde :

    Comme un qui erre aux champs, lors que la nuict au monde
    Ravit toute clarté, j'avois perdu long temps
    Voye, route, et lumiere, et presque avec le sens,
    ...

  • Si quelqu'un veut savoir qui me lie et enflamme,
    Qui esclave a rendu ma franche liberté,
    Et qui m'a asservi, c'est l'exquise beauté,
    D'une que jour et nuit j'invoque et je réclame.

    C'est Le feu, c'est Le noeud, qui lie ainsi mon âme,
    Qui embrase mon coeur, et le tient garotté
    D'un lien si serré de ferme loyauté,
    Qu'il ne sauroit aimer ni servir autre...

  • En tous maux que peut faire un amoureux orage
    Pleuvoir dessus ma tête, il me plaît d'assurer
    Et séréner mon front, et sans deuil mesurer
    De l'âme l'allégresse à celle du visage.

    Ta fille tendrelette admirable en cet âge
    Où elle tette encor, vient tes coups endurer
    Sur ses petites mains, sans crier, sans pleurer,
    Sans frayeur, sans aigrir visage ni...

  • Je m'étoy retiré du peuple, et solitaire
    Je tachoy tous les jours de jouir sainctement
    Des celestes vertus, que jadis justement
    Jupiter retira des yeux du populaire.

    Ja les unes venoyent devers moy se retraire,
    Les autres j'appelloy de moment en moment
    Quand l'amour traistre helas! (las trop fatalement)
    Ce fut, ô ma Pandore, en mall'heure me plaire :...