• A l'heure du réveil des sèves
    L'Amour, d'un geste las,
    Sème les rimes et les rêves
    Parmi les lis et les lilas.

    La brise, soeur des hirondelles,
    Déferle son essor,
    Et frôle de mille coups d'ailes
    Les corolles d'azur et d'or.

    Amour, pour fêter ta victoire
    Les cieux se sont fleuris,
    Et mai t'auréole de gloire,
    O roi des Roses...

  • Tu vins vers moi par les vallées
    Où s'effeuillaient les azalées,
    O soeur des heures en allées !

    Ta toison était de couleur
    Rousse, et ta bouche de douleur
    Pareille à la mort d'une fleur.

    Tes yeux semblaient des cieux d'automme
    Où le dernier orage tonne,
    Mélancolique et monotone.

    Ta voix chantant la mort d'un roi
    Fut...

  • A STEPHANE MALLARME

    Au temps du gazouillis des feuilles, en avril,
    La voix du divin Pan s'avive de folie,
    Et son souffle qui siffle en la flûte polie
    Eveille les désirs du renouveau viril.

    Comme un appel strident de naïade en péril
    L'hymne vibre en le vert de la forêt pâlie
    D'où répond, note à note, écho qui se délie,
    L'ironique pipeau...

  • Des rossignols chantant à des lys
    Sous la lune d'or de l'été, telle,
    O toi, fut mon âme de jadis.

    Tu vins cueillir mes lys d'espoir, Belle,
    Mes lys qui saignèrent dans ta main
    Quand se leva la lune nouvelle.

    Amour, sera-ce bientôt demain,
    Demain matin et ses chants de cloches
    EL les oiseaux aux croix du chemin ?

    Pauvre, il...

  • Le lierre noir et la rose églantine
    Défendent les portes du jardin
    Où le soir d'un printemps qui s'obstine
    Est tout d'azur et d'incarnadin.

    Dehors s'éplorent les folles fontaines
    Qui virent mi-mort d'amour l'Enfant
    Venu par les routes incertaines
    Vers ce seuil du rêve triomphant,

    N'ayant connu ni la magique épée
    Que ne rouille pas le...

  • A PAUL VERLAINE.

    I

    Par le jardin royal, en l'arôme des roses,
    La princesse aux yeux pers, soeur nubile des fleurs,
    Erre en pleurs au vouloir de ses rêves moroses :

    Les mille et mille voix du triomphal matin
    Lui murmurent l'amour, et le soleil sommeille
    En ses cheveux épars sur son col enfantin.

    Un jet d'eau dont la gerbe en...

  • A EPHRAÏM MIKHAËL.

    Par les vastes forêts, à l'heure vespérale,
    Les ruisseaux endormeurs modulent leurs sanglots :
    Mon âme s'alanguit d'une horreur sépulcrale
    A l'heure vespérale où murmurent les flots.

    Les ruisseaux endormeurs modulent leurs sanglots
    Sous les feuilles que frôle un vent crépusculaire :
    A l'heure vespérale où murmurent les flots...

  • Ô paix de ce pays d'ici
    Où jadis nous nous aimâmes
    Par nos corps et par nos âmes,
    Ô paix de ce pays d'ici !

    Le crépuscule dans les arbres
    Dont tous les oiseaux sont fous
    De s'être aimés comme nous,
    Le crépuscule dans les arbres !

    Et ce fleuve sous la forêt
    Où, soeur folle des automnes,
    Tu cueillais les anémones,
    Et ce fleuve...

  • Je suis ce roi des anciens temps
    Dont la cité dort sous la mer
    Aux chocs sourds des cloches de fer
    Qui sonnèrent trop de printemps.

    Je crois savoir des noms de reines
    Défuntes depuis tant d'années,
    Ô mon âme ! et des fleurs fanées
    Semblent tomber des nuits sereines.

    Les vaisseaux lourds de mon trésor
    Ont tous sombré je ne sais où,
    ...

  • Ode

    Dans mon sein, vérité suprême,
    Descends du ciel pour m'éclairer.
    Je veux me connaître moi-même ;
    Il est honteux de s'ignorer.
    Du coeur humain perçons l'abîme ;
    C'est de cette étude sublime
    Que l'homme s'occupe le moins.
    Dans ce coeur porte la lumière :
    Montre-moi la cause première
    Et le vrai but de tous ses soins.

    ...